Quelquesmois avant la campagne pour le référendum du 27 avril 1969, un scandale éclabousse Claude Pompidou, alors que son mari est potentiellement candidat à la succession du général de Gaulle, à l'expiration du mandat de celui
Alain Pompidou nous fait revivre la passion de ses parents pour l'art. Georges et Claude Pompidou formaient un couple pétri de culture classique mais... Lire la suite 9,99 € E-book - ePub Poche Expédié sous 3 à 6 jours 9,00 € Ebook Téléchargement immédiat 9,99 € Grand format Expédié sous 3 à 6 jours 19,90 € Vous pouvez lire cet ebook sur les supports de lecture suivants Téléchargement immédiat Dès validation de votre commande Offrir maintenant Ou planifier dans votre panier Alain Pompidou nous fait revivre la passion de ses parents pour l'art. Georges et Claude Pompidou formaient un couple pétri de culture classique mais en avance sur son temps. Leur insatiable curiosité partagée, au-delà de la disparition du Président, apparaît donc doublement animée par l'amour de l'art. Un nouveau regard sur les Pompidou nourri par les témoignages inédits de Madeleine Malraux, Maïa Paulin, Pierre Soulages... Au début des années trente, au Quartier latin, une rencontre inattendue réunit Georges Pompidou et Claude Cahour. Ils se marient quelques années plus tard et forment un couple uni partageant le goût de la littérature, de la musique, du cinéma. Très vite, ils fréquentent les galeries d'art et les artistes contemporains. Dès 1948, les Pompidou - comme on les appelle avec affection - font l'acquisition de leur première toile abstraite signée d'un peintre alors peu connu Youla Chapoval. Par la suite, au fil des rencontres, leur collection se construit en relation étroite avec les créateurs. En 1958, Claude offre à son mari un Nicolas de Staël. En 1962, l'accrochage d'un Soulages dans le bureau du Premier ministre surprend. Quand, en 1969, à l'Élysée, le Président et son épouse font appel à Pierre Paulin et à Yaacov Agam pour la rénovation et la décoration de leurs appartements privés, force est de constater que l'art représente pour eux une raison de vivre. Que la création du Centre Pompidou viendra couronner. C'est cette fusion artistique, ce sens inné des ouvres capables d'entrer dans l'Histoire, leurs rapports avec les artistes qu'Alain Pompidou et César Armand dévoilent dans cet ouvrage biographique et intime, riche de souvenirs, de témoignages et d'illustrations. À travers le récit de leur fils, les souvenirs de l'épouse de Jean Coural, directeur du Mobilier national, de Maïa Paulin, Pierre Soulages, Jack Lang et bien d'autres, ce livre révèle le parcours initiatique autant qu'affectif d'un couple pas comme les autres, mu par une insatiable curiosité. Date de parution 09/11/2017 Editeur ISBN 978-2-259-26417-4 EAN 9782259264174 Format ePub Nb. de pages 260 pages Caractéristiques du format ePub Pages 260 Taille 22 882 Ko Protection num. Digital Watermarking Biographie d'Alain Pompidou César Armand est un jeune journaliste économique et politique, également amateur d'art. Alain Pompidou, fils de Claude et Georges Pompidou, passionné et collectionneur d'art, est professeur émérite de biologie médicale - il réalise ses propres brevets dans le champ du diagnostic. Après la publication de la correspondance de son père et d'un livre sur sa mère, il consacre son temps aux archives familiales.
Cequi vous attend pour la 3e édition du festival Au-delà de l'écran Le festival de cinéma de Vincennes, Au-delà de l'écran, revient dès ce
Voici 46 cas, autant de situations différentes et souvent dramatiques. Perdre la vie, perdre une bataille ou une place enviée, perdre un combat idéologique, perdre la confiance du peuple ou d’un partenaire essentiel, perdre la face et l’honneur. Perdre parce qu’on est faible ou qu’on se croit trop fort, perdre par malchance, par injustice ou par la force des choses et du sens de l’Histoire Louis XVI sous la Révolution. Perdre individuellement, mais aussi en groupe les femmes, les Templiers, les Girondins sous la Révolution, les canuts de Lyon, la Commune de Paris. Certains cas semblent anecdotiques ou paradoxaux – nous assumons, avec des arguments. Malgré tout, ces perdantes et perdants sont honorés à des titres divers. Aux grands hommes, la patrie reconnaissante » le Panthéon leur fait place. Ils se retrouvent ici et là statufiés ou s’inscrivent dans la toponymie de nos rues, nos places, notre environnement quotidien. Ils figurent dans les livres d’histoire et les dictionnaires, renaissent dans des œuvres de fiction littéraire, théâtrale, lyrique. La sanctification honore volontiers les femmes, Blandine, Geneviève, Jeanne d’Arc. Parfois, les perdants font école, créant un courant d’idées, une théorie, voire une religion qui change le monde – Jésus-Christ, l’exemple incroyable mais vrai ». Autant de qui perd gagne » permettant une revanche posthume. On peut en tirer une petite philosophie de l’Histoire et réfléchir au travail de mémoire dont on parle tant. C’est le but de nos éditos et la preuve que les citations bien choisies se révèlent toujours utiles. C’est aussi l’occasion de démentir deux personnages exceptionnellement réunis À la fin, il n’y a que la mort qui gagne. » 2980Charles de GAULLE 1890-1970, citant volontiers ce mot de STALINE dans ses Mémoires de guerre.Toutes les citations numérotées sont comme toujours tirées de notre Histoire en citations Honneur aux perdants, retrouvez nos quatre éditos De la Gaule aux guerres de Religion Du règne d’Henri IV à la Révolution De l’Empire à la Deuxième République De la Troisième République à nos jours IV. De la Troisième République à nos jours LOUISE MICHEL ET LA COMMUNE DE PARIS Révolution manquée, incarnée par la Vierge rouge » et des socialistes plus ou moins utopistes et radicaux dont les idées vont nourrir nombre de réformes à venir. Suite à la tragique répression, la mémoire de la Semaine sanglante » marquera les générations de gauche. Faisons la révolution d’abord, on verra ensuite. »2330 Louise MICHEL 1830-1905. L’Épopée de la révolte le roman vrai d’un siècle d’anarchie 1963, Gilbert Guilleminault, André Mahé C’est l’héroïne la plus populaire de cette page d’histoire ex-institutrice, féministe, militante républicaine et anarchiste, surnommée la Vierge rouge », elle appelle à l’insurrection les quartiers rouges » de la capitale, ceux qui font toujours peur aux bourgeois Montmartre, Belleville, ô légions vaillantes, / Venez, c’est l’heure d’en finir. / Debout ! La honte est lourde et pesantes les chaînes, / Debout ! Il est beau de mourir. » On la voit sur les barricades dès les premiers jours du soulèvement de Paris cause perdue d’avance, révolution sans espoir, utopie d’un Paris libre dans une France libre » ? En tout cas, rien de moins prémédité que ce mouvement qui échappe à ceux qui tentent de le diriger, au nom d’idéaux d’ailleurs contradictoires. Au nom du peuple, la Commune est proclamée ! »2363 Gabriel RANVIER 1828-1879, place de l’Hôtel-de-Ville, Déclaration du 28 mars 1871. Histoire socialiste, 1789-1900, volume XI, La Commune, Louis Dubreuilh, sous la direction de Jean Jaurès 1908 Ranvier est maire de Belleville, ouvrier peintre décorateur et disciple de Blanqui - l’éternel insurgé. Les élections municipales du 26 mars n’ont mobilisé que la moitié des Parisiens 230 000 votants, très majoritairement de gauche, beaucoup de gens des beaux quartiers ayant fui la capitale 18 élus bourgeois » refuseront de siéger à côté des 72 révolutionnaires, jacobins, proudhoniens, blanquistes, socialistes, internationaux. Comment définir cette Commune ? Un conseil municipal de gauche, un contre-gouvernement élu, provisoire et rival de celui de Versailles, un exemple devant servir de modèle à la France ? La Commune de Paris se veut tout à la fois, mais ne vivra pas deux mois. Paris ouvrait à une page blanche le livre de l’histoire et y inscrivait son nom puissant ! »2364 Comité central de la garde nationale, Proclamation du 28 mars 1871. Histoire du socialisme 1879, Benoît Malon En présence de 200 000 Parisiens, le comité central de la garde nationale s’efface devant la Commune, le jour de sa proclamation officielle. Le lyrisme s’affiche Aujourd’hui il nous a été donné d’assister au spectacle populaire le plus grandiose qui ait jamais frappé nos yeux, qui ait jamais ému notre âme. » Le mouvement s’étend à quelques villes Lyon, Marseille, Narbonne, Toulouse, Saint-Étienne. La révolution sera la floraison de l’humanité comme l’amour est la floraison du cœur. »2365 Louise MICHEL 1830-1905, La Commune, Histoire et souvenirs 1898 Un quart de siècle après, elle fait revivre ces souvenirs vibrants et tragiques. Face aux Communards ou Fédérés, les Versaillais se préparent, troupes commandées par les généraux Mac-Mahon et Vinoy. En plus des 63 500 hommes dont l’État dispose, il y a les 130 000 prisonniers libérés par Bismarck – hostile à tout mouvement populaire à tendance révolutionnaire. Le 30 mars, Paris est pour la seconde fois ville assiégée, bombardée, et à présent par des Français. Premiers affrontements, le 2 avril bataille de Courbevoie. Les Fédérés ou Communards tentent une sortie de Paris pour marcher sur Versailles où l’Assemblée nationale s’est repliée, mais sont arrêtés par le canon du Mont Valérien, fort stratégique investi par les Versaillais depuis le 21 mars les rêveurs de la Commune qualifient les obus qui les écrasent de choses printanières » ! 17 tués dont les 5 premiers fusillés de la Commune et 25 prisonniers chez les Fédérés. Dans l’armée versaillaise, 5 morts et 21 blessés. Nous avons la mission d’accomplir la révolution moderne la plus large et la plus féconde de toutes celles qui ont illuminé l’histoire. »2369 La Commune, Déclaration au peuple français, 19 avril 1871. Enquête parlementaire sur l’insurrection du 18 mars 1872, Commission d’enquête sur l’insurrection du 18 mars, comte Napoléon Daru La Commune ne fait pas que se défendre et attaquer. Elle gouverne Paris et prend des mesures importantes qui préfigurent l’œuvre de la Troisième République séparation des Églises et de l’État, instruction laïque, gratuite et obligatoire en projet. Elle est socialiste quand elle communalise » par décret du 16 avril les ateliers abandonnés par les fabricants en fuite, pour en donner la gestion à des coopératives formées par les Chambres syndicales ouvrières. Ce qui fait écrire à Karl Marx, l’année même C’était la première révolution dans laquelle la classe ouvrière était ouvertement reconnue comme la seule qui fût encore capable d’initiatives sociales » La Guerre civile en France. Paris sera soumis à la puissance de l’État comme un hameau de cent habitants. »2373 Adolphe THIERS 1797-1877, Déclaration du 15 mai 1871. La Commune 1904, Paul et Victor Margueritte Ces mots plusieurs fois répétés annoncent la Semaine sanglante du 22 au 28 mai. Le chef du gouvernement amasse toujours plus de troupes aux portes de Paris, espérant sans trop y croire que ses menaces feront céder les Communards. Puisqu’il semble que tout cœur qui bat pour la liberté n’ait droit qu’à un peu de plomb, j’en réclame ma part, moi ! Si vous n’êtes pas des lâches, tuez-moi ! »2375 Louise MICHEL 1830-1905. Histoire de ma vie 2000, Louise Michel, Xavière Gauthier La Vierge rouge se retrouve sur les barricades, fusil sur l’épaule. Paris est reconquis, rue par rue, et incendié. La dernière barricade des Fédérés, rue Ramponeau, tombe le 28 mai 1871. À 15 heures, toute résistance a cessé. Le bon Dieu est trop Versaillais. »2378 Louise MICHEL 1830-1905, La Commune, Histoire et souvenirs 1898 Elle témoigne de l’inévitable victoire des Versaillais, vu l’inégalité des forces et de l’organisation. Bilan de la Semaine sanglante, du 22 au 28 mai 1871 au moins 20 000 morts chez les insurgés, 35 000 selon Rochefort. De son côté, l’armée bien organisée des Versaillais a perdu moins de 900 hommes, depuis avril. Les journalistes, unanimes, condamnent la répression. La Seine est devenue un fleuve de sang. Dans Le Siècle, on écrit C’est une folie furieuse. On ne distingue plus l’innocent du coupable. » Et dans Paris-Journal du 9 juin C’est au bois de Boulogne que seront exécutés à l’avenir les gens condamnés par la cour martiale. Toutes les fois que le nombre des condamnés dépassera dix hommes, on remplacera par une mitrailleuse le peloton d’exécution. » 3 500 insurgés sont fusillés sans jugement dans Paris, près de 2 000 dans la cour de prison de la Roquette, plusieurs centaines au cimetière du Père-Lachaise c’est le mur des Fédérés », de sinistre mémoire. Il y aura 400 000 dénonciations écrites – sur 2 millions de Parisiens, ce fort pourcentage de délateurs montre assez la haine accumulée. On ne peut pas tuer l’idée à coups de canon ni lui mettre les poucettes [menottes]. »2381 Louise MICHEL 1830-1905, La Commune, Histoire et souvenirs 1898 Condamnée, déportée en Nouvelle-Calédonie, amnistiée en 1880, elle reviendra en France pour continuer le combat en militante. Le cadavre est à terre, mais l’idée est debout », dit Hugo à propos de la Commune. La force des idées est l’une des leçons de l’histoire, la Commune en est l’illustration, malgré la confusion des courants qui l’animèrent. Un chant y est né, porteur d’une idée qui fera le tour du monde et en changera le cours, c’est L’Internationale Debout ! Les damnés de la terre ! / Debout ! Les forçats de la faim ! … C’est la lutte finale ; / Groupons-nous et demain / L’Internationale / Sera le genre humain. » Paroles d’Eugène Pottier, mises en musique par Pierre Degeyter. [La Commune] fut dans son essence, elle fut dans son fond la première grande bataille rangée du Travail contre le Capital. Et c’est même parce qu’elle fut cela avant tout […] qu’elle fut vaincue et que, vaincue, elle fut égorgée. »2384 Jean JAURÈS 1859-1914, Histoire socialiste, 1789-1900, volume XI, La Commune, Louis Dubreuilh 1908 Jaurès, qui dirige ce travail en 13 volumes juge à la fois en historien et en socialiste. Homme politique, il sera toujours du côté du Travail et des travailleurs. N’excluant pas le recours à la force insurrectionnelle malgré son pacifisme, il aurait sans doute été Communard. Le Paris ouvrier, avec sa Commune, sera célébré à jamais comme le glorieux fourrier d’une société nouvelle. Ses martyrs seront enclos dans le grand cœur de la classe ouvrière. »2385 Karl MARX 1818-1883, La Guerre civile en France 1871 Hommage du militant révolutionnaire, même si le théoricien socialiste émit de nombreuses réserves ! Le mouvement ouvrier français restera marqué par les conséquences de la Commune vide dans le rang de ses militants, haine des victimes contre les bourreaux, force du mythe qui s’attache à jamais au nom de la Commune. ADOLPHE THIERS Républicain de la première heure et longtemps condamné à l’opposition malgré son goût du pouvoir, il rate de peu la présidence sous la Troisième République et reste impopulaire dans l’histoire pour sa répression de la Commune. Double injustice réparée par quelques historiens. Faisons donc la République, la République honnête, sage, conservatrice. »2060 Adolphe THIERS 1797-1877, Manifeste de M. Thiers. Portraits historiques 1883, H. Draussin Apparition d’un homme politique qui va faire carrière jusque sous la Troisième République. Pour l’heure, Louis Adolphe Thiers est un jeune avocat qui a fréquenté les milieux libéraux et collaboré au Constitutionnel. En janvier 1830, il crée un autre journal d’opposition orléaniste, Le National. Il défend une monarchie constitutionnelle de type anglais et s’oppose aux Doctrinaires, Guizot et Royer-Collard pour qui le trône n’est pas un fauteuil vide ». Ces débats agitent l’opinion. La Charte revue et corrigée, approuvée le 7 août 1830 par une majorité de députés 219 contre 33, mais plus de 200 absents, reconnaît certes la liberté de la presse, l’abolition de la censure, l’initiative des lois à la Chambre, la suppression des justices d’exception, tandis que le catholicisme n’est plus religion d’État. Mais l’on se retrouve quand même en monarchie. Le 9 août, le duc d’Orléans prête serment sur la Charte et devient Louis-Philippe Ier, roi des Français et non plus roi de France. Thiers va cautionner cette monarchie constitutionnelle, comme le très républicain La Fayette qui s’y est rallié. Ministre de Louis-Philippe à plusieurs reprises, Thiers tentera de sauver le régime en 1848. La République est le gouvernement qui nous divise le moins. »2201 Adolphe THIERS 1797-1877, Assemblée législative, 13 février 1850. L’Empire libéral Louis-Napoléon et le coup d’état 1897, Émile Ollivier Le parti de l’Ordre est au pouvoir et cette majorité satisfait ou rassure, sous cette Deuxième République. Mais Thiers se méfie bientôt de Louis-Napoléon devenu président de cette République, avant d’instaurer le Second Empire suite à un coup d’État. Thiers se retrouve dans l’opposition républicaine et se fait remarquer pour sa défense des libertés, puis son hostilité à la guerre franco-allemande. Pacifier, réorganiser, relever le crédit, ranimer le travail, voilà la seule politique possible et même concevable en ce moment. »2355 Adolphe THIERS 1797-1877, présentant son ministère et son programme à l’Assemblée, Bordeaux, 19 février 1871. Questions ouvrières et industrielles en France sous la Troisième République 1907, Pierre Émile Levasseur 1871 année de tous les pouvoirs et tous les dangers pour cet homme de 74 ans, élu député par 26 départements à la fois et devenu chef du pouvoir exécutif de la République », le 17 février. Lourde tâche, dans une France vaincue et déchirée. En vieux routier de la politique, Thiers s’engage à respecter la trêve des partis et à différer toute discussion sur la forme du régime et la Constitution. Son programme prend le nom de Pacte de Bordeaux. Mais la guerre civile va de nouveau bouleverser le pays et déjouer tous les plans politiques. Il n’y a qu’une solution radicale qui puisse sauver le pays il faut évacuer Paris. Je n’abandonne pas la patrie, je la sauve ! »2361 Adolphe THIERS 1797-1877, aux ministres de son gouvernement, 18 mars 1871. Histoire de la France et des Français 1972, André Castelot, Alain Decaux Thiers a décidé d’en finir avec la Commune et la Terreur qui s’organise dans Paris, affolant une France majoritairement monarchiste et fondamentalement bourgeoise. Ordre est donné de désarmer les quelque 200 000 gardes nationaux organisés en Fédération et de récupérer les 227 canons qui ont servi à la défense de Paris contre les Prussiens, à présent regroupés à Montmartre et Belleville, quartiers populaires. Les 4 000 soldats font leur devoir sans enthousiasme. La foule, les femmes surtout s’interposent. Deux généraux, l’un chargé de l’opération, l’autre à la retraite, mais reconnu, sont arrêtés, traînés au Château rouge ancien bal de la rue Clignancourt, devenu quartier général des Fédérés, blessés, puis fusillés Lecomte et Thomas. Clemenceau, maire du XVIIIe arrondissement et témoin, est atterré. On ne connaîtra jamais les responsables de cette exécution sommaire leur nom est la foule » Georges Duby. C’est l’étincelle qui met le feu à Paris, insurgé en quelques heures. Thiers renonce à réprimer l’émeute – il dispose de 30 000 soldats face aux 150 000 hommes de la garde nationale et il n’est même pas sûr de leur fidélité. Il abandonne Paris au pouvoir de la rue et regagne Versailles, ordonnant à l’armée et aux corps constitués d’évacuer la place. C’est la première journée de la Commune au sens d’insurrection la tragédie va durer 72 jours. Elle se termine par la Semaine sanglante du 22 au 28 mai. La presse dénonce la sauvagerie de la répression, mais Thiers gagne en popularité auprès des Français pour ce rétablissement de l’ordre devenu indispensable. L’heure de gloire semble enfin arrivée pour le vieux Républicain. Chef, c’est un qualificatif de cuisinier ! »2418 Adolphe THIERS 1797-1877. Histoire de la France et des Français 1972, André Castelot, Alain Decaux Le petit homme, surnommé Foutriquet pour sa houppe de cheveux et son mètre cinquante-cinq, troque son titre de chef du pouvoir exécutif pour celui, plus prestigieux, de président de la République autoproclamé, le 31 août 1871, tandis que l’Assemblée se proclame Constituante c’est la loi Rivet député de centre gauche, ami de Thiers. Rappelons que la tâche institutionnelle avait sagement été remise à plus tard, en février 1871. Profitant de son prestige, le libérateur du territoire » s’impose, aussi conservateur que républicain, soutenu par Gambetta lui-même, républicain d’extrême gauche à la tête de l’Union républicaine. La République existe, elle est le gouvernement légal du pays, vouloir autre chose serait une nouvelle révolution et la plus redoutable de toutes. »2422 Adolphe THIERS 1797-1877, Discours de rentrée parlementaire, 13 novembre 1872. Discours parlementaires de M. Thiers 1872-1877 posthume, 1883 Il veut défendre sa » République qui n’est toujours qu’un régime provisoire. Il rappelle que c’est le régime qui nous divise le moins » autre idée opportuniste » et met en garde les monarchistes, majoritaires de l’Assemblée. La République sera conservatrice ou elle ne sera pas. » Il prêche toujours pour sa paroisse, en l’occurrence sa personne. Et d’insister Tout gouvernement doit être conservateur et nulle société ne pourrait vivre sans un gouvernement qui ne le serait point. » Il vise alors les républicains avancés de l’Assemblée. C’est la tactique classique du un coup à droite, un coup à gauche ». Fort de son autorité, Thiers veut rassurer le pays et pour faire la République, jouer l’alliance des républicains modérés et des orléanistes, contre les extrêmes légitimistes ultras inconditionnels du drapeau blanc et nostalgiques de la Commune révolutionnaire. Le conflit va éclater quelques mois plus tard. Il faut tout prendre au sérieux, mais rien au tragique. »2427 Adolphe THIERS 1797-1877, Discours à la Chambre des députés, 24 mai 1873. Annales de l’Assemblée nationale, volume XVIII 1873, Assemblée nationale Contesté pour son parti pris républicain par les monarchistes majoritaires, Thiers a perdu son droit de parole à l’Assemblée président de la République, il ne peut plus s’exprimer que par un message lu, ne donnant lieu à aucune discussion loi de Broglie, du 13 mars. Il se conforme à ce cérémonial chinois ». La veille, de Broglie l’a interpellé sur la nécessité de défendre l’ ordre moral », des députés royalistes lui demandant de faire prévaloir une politique résolument conservatrice ». Le 24 mai au matin, avant la séance à la Chambre, il réaffirme sa position républicaine La monarchie est impossible il n’y a qu’un trône, et on ne peut l’occuper à trois ! » Outre le comte de Paris et le comte de Chambord, il y a encore le prince impérial, fils de Napoléon III. L’après-midi, en son absence, par 360 voix contre 334, l’Assemblée vote un blâme contre Thiers. Il offre sa démission. Il n’y est pas obligé, mais il est sûr qu’on le rappellera et sa position en sera renforcée. Le soir, sa lettre est lue à l’Assemblée qui procède aussitôt à l’élection du nouveau président. La gauche s’abstient… et le maréchal Mac-Mahon, candidat des royalistes, est élu. Thiers a joué, et perdu. Saluons son humour devenu proverbe Il faut tout prendre au sérieux, mais rien au tragique. » La République, c’est la nécessité. »2455 Adolphe THIERS 1797-1877. Discours parlementaires de M. Thiers 1872-1877 posthume, 1883 Dernier message du vieux républicain. Il meurt le 3 septembre 1877. Sa famille refuse les obsèques officielles. Mais 384 villes sont représentées et une foule estimée à un million assiste à ses funérailles parisiennes. L’émotion nationale atteste à la fois l’immense prestige du petit homme et son incontestable réussite son ralliement à la République a su rallier le pays à ce régime et réconcilier les Français avec les républicains. Le presse témoigne de sa popularité. Ce vieillard, dont l’histoire était celle du pays depuis près de soixante ans, apparaissait déjà comme un personnage légendaire et, cependant, avec le passé, il représentait pour nous, pour la France républicaine et libérale, un avenir long et utile… Il avait encore des services à rendre, des conseils à donner, des hommes à éclairer ; sa grande expérience, sa clairvoyance inaltérable, sa passion du bien public donnaient à ses avis une autorité tout à fait unique ». Journal Le Temps, 5 septembre 1877, résumant la carrière de Thiers L’impopularité viendra plus tard, par ignorance de l’histoire certes complexe qui a précédé l’avènement de la Troisième République et par le culte de la Commune qui ne va cesser de grandir. En 1990, l’historien François Roth résume bien Il faut débarrasser la mémoire de Thiers des légendes qui l’obscurcissent. La plupart de ses contemporains l’ont porté aux nues et n’ont pas tari d’éloges sur l’illustre négociateur », sur l’éminente sagesse de l’illustre homme d’État ». Les historiens du début du [XXe] siècle ont baissé un peu le ton tout en l’approuvant. Puis un courant d’opinion amorcé par les ouvrages d’Henri Guillemin l’a rejeté. Pour les insurgés de 1968 et les célébrants intellectuels du centenaire de la Commune, le cas de Thiers n’est même plus plaidable […] Il faut toujours revenir au contexte de février 1871. Avec ce qui restait d’armée, la reprise de la guerre était une totale illusion. […] Thiers a été suivi, la mort dans l’âme, par l’immense majorité de ses compatriotes. » La Guerre de 70, Fayard, 1990. Je n’aimais pas ce roi des prud’hommes. N’importe ! comparé aux autres, c’est un géant. »2456 Gustave FLAUBERT 1821-1880, à la mort de Thiers, Correspondance 1893 … et puis il avait une vertu rare le patriotisme. Personne n’a résumé comme lui la France, de là l’immense effet de sa mort. » Flaubert, un an plus tôt, s’exclamait pourtant Rugissons contre M. Thiers ! Peut-on voir un plus triomphant imbécile, un croûtard plus abject, un plus étroniforme bourgeois ! Non, rien ne peut donner l’idée du vomissement que m’inspire ce vieux melon diplomatique, arrondissant sa bêtise sur le fumier de la bourgeoisie ! Il me semble éternel comme la médiocrité ! » Cet hommage posthume et du bout de la plume prendra encore plus de valeur par la suite le personnel politique de la Troisième République fut – sauf exceptions – d’une grande médiocrité. CLEMENT ADER Inventeur tout terrain, la Troisième République ne l’a pas soutenu au même titre que d’autres noms. Il reste quand même dans la mémoire collective comme le premier aviateur de l’histoire. Ils m’ont étranglé avec la cravate. »2537 Clément ADER 1841-1925. Lettre ouverte à mon grand-père qui avait le tort d’avoir raison 1995, Marcel Jullian C’est le pionnier de l’aviation avec le premier vol au monde d’un mètre de haut et cinquante de long sur Éole I, petit monomoteur, en octobre 1890. Une nouvelle démonstration au camp de Satory en 1897 échoue en raison d’un vent violent et le ministre de la Guerre ne donne pas suite à sa commande. L’ingénieur et inventeur par ailleurs touche-à-tout renonce en 1903, découragé par l’incompréhension des politiques. Il a ce mot bien plus tard, quand on veut le consoler avec la cravate » en le nommant commandeur de la Légion d’honneur. Louis Blériot vengera Ader en traversant la Manche en avion juillet 1909 et Roland Garros, la Méditerranée septembre 1913. Le vol des oiseaux et des insectes m’a toujours préoccupé… J’avais essayé tous les genres d’ailes d’oiseaux, de chauve-souris et d’insectes, disposées en ailes battantes, ou ailes fixes avec hélice… je découvris l’importante courbe universelle du vol ou de sustentation. » Clément ADER 1841-1925, L’Aéroplane Éole, 1893 Il consacra une partie de sa vie à la réalisation d’un rêve d’enfant faire voler un plus lourd que l’air autopropulsé ». Ses travaux et recherches pour y parvenir coûtaient cher. Il trouva d’abord un parrain à la fois généreux et avisé, l’homme d’affaires Isaac Pereire, créateur de la banque moderne avec son frère Isaac-Jacob sous le Second Empire. Pendant la guerre de 1870, employé comme scientifique, Clément Ader tente sans succès de réaliser un cerf-volant capable d’emporter un homme. En 1874, il construit un planeur de neuf mètres d’envergure, pesant 24 kg et capable de recevoir un moteur. Certaines photographies de son ami Nadar en témoignent. Des études menées au Musée de l’air et de l’espace du Bourget tendraient à montrer que cette machine était capable de s’élever dans les airs. Par la suite, ayant convaincu le ministre de la Guerre de financer ses travaux, Ader aidé de Ferdinand Morel, ingénieur qui dessina les plans de l’avion Chauve-souris mit au point des prototypes aux voilures inspirées d’observations naturalistes, imitant l’aile de la chauve-souris. Ader pensait qu’une fois le vol maîtrisé, une aile rigide comme celle des oiseaux serait plus efficace et plus solide. Mais il ne fallait pas tenter de reproduire le battement des ailes d’oiseau, le concept de voilure fixe étant plus approprié. Entre 1890 et 1897, il réalisa trois appareils l’Éole, financé par lui-même, le Zéphyr Ader Avion II et l’Aquilon Ader Avion III subventionnés par l’État. GÉNÉRAL BOULANGER Le Brav’ général jouit d’une incroyable popularité qui met en danger la République, avant de sombrer dans le ridicule – aidé par Clemenceau. Il laisse quand même son nom au boulangisme », précurseur du populisme de plus en plus répandu. La popularité du général Boulanger est venue trop tôt à quelqu’un qui aimait trop le bruit. »2481 Georges CLEMENCEAU 1841-1929. Le Boulangisme 1946, Adrien Dansette Boulanger est imposé au gouvernement le 7 janvier 1886 par les radicaux, Clemenceau en tête, avec qui les républicains opportunistes doivent compter. Le nouveau ministre de la Guerre devient vite le brav’général Boulanger » pour l’armée, sachant se rendre populaire par diverses réformes qui améliorent l’ordinaire du conscrit. Sa popularité va gagner les rangs des innombrables mécontents du régime. Le 14 juillet 1886 sera la première apothéose de sa fulgurante ascension. Il reviendra quand le tambour battra,Quand l’étranger m’naç’ra notre frontièreIl reviendra et chacun le suivraPour cortège il aura la France entière. »2485 Refrain populaire en l’honneur du général Revanche 1887, chanson. Le Général Boulanger jugé par ses partisans et ses adversaires 1888, Georges Grison Le 8 juillet 1887, la foule se masse à la gare de Lyon pour empêcher le départ de son idole. La popularité de Boulanger devenait gênante pour les républicains opportunistes qui ont par ailleurs jaugé le personnage, irresponsable et bien léger. En mai, il a perdu son portefeuille sous le nouveau ministère Rouvier. Le voilà expédié à Clermont-Ferrand pour commander le 13e corps d’armée. Mais le voilà aussi éligible. Dissolution, Révision, Constituante. »2492 Général BOULANGER 1837-1891, Mot d’ordre de sa campagne électorale, printemps 1888. Histoire politique de l’Europe contemporaine 1897, Charles Seignobos Le scandale des décorations à l’Élysée a transformé la vague de sentimentalité populaire en mouvement politique le boulangisme, devenu syndicat des mécontents », hostile aux républicains opportunistes au pouvoir, menace le régime parlementaire. Il rassemble des radicaux qui veulent depuis toujours la révision de la Constitution Rochefort, Naquet, des patriotes de droite qui ne rêvent que revanche Déroulède, mais aussi des royalistes et des bonapartistes. Boulanger se pose en champion d’une République nouvelle et crée son Parti républicain national. Clemenceau se méfie, voyant poindre un nouveau Bonaparte, et Charles Floquet, président du Conseil, dans son discours à la Chambre du 19 avril 1888, qualifie le général Boulanger de manteau troué de la dictature », avant de le blesser dans un duel à l’épée, le 13 juillet. Pourquoi voulez-vous que j’aille conquérir illégalement le pouvoir quand je suis sûr d’y être porté dans six mois par l’unanimité de la France ? »2496 Général BOULANGER 1837-1891, réponse aux manifestants, 27 janvier 1889. Histoire de la Troisième République, volume II 1963, Jacques Chastenet Réponse aux manifestants qui lui crient À l’Élysée ! » et marchent vers le palais où le président Carnot fait déjà ses malles ! Boulanger choisit la légalité ce 27 janvier 1889, il choisit aussi d’écouter les conseils de sa maîtresse passionnément aimée, Marguerite de Bonnemains– il ignore qu’elle travaille pour la police. Cela laisse le temps au gouvernement de réagir le ministre de l’Intérieur, Ernest Constans, accuse Boulanger de complot contre l’État. Craignant d’être arrêté, il fuit en Belgique. Son prestige s’effondre. Il est mort comme il a vécu en sous-lieutenant. »2499 Georges CLEMENCEAU 1841-1929, apprenant le suicide du général Boulanger sur la tombe de sa maîtresse à Ixelles Belgique, le 30 septembre 1891. Histoire de la France 1947, André Maurois L’épitaphe est cinglante, mais la fin du Brave Général » qui fit trembler la République est un fait divers pitoyable. Le 14 août, le Sénat, réuni en Haute Cour de justice, l’a condamné par contumace à la déportation. Sa maîtresse, Mme de Bonnemains, meurt du mal du siècle la phtisie, le 16 juillet 1891. Sur sa tombe, toujours fou d’amour, Boulanger fait graver ces mots Marguerite… à bientôt ». Le 30 septembre, il revient se tirer une balle dans la tête, pour être enterré dans la même tombe où l’on gravera Ai-je bien pu vivre deux mois et demi sans toi ? » Parlez-nous de lui, grand-mère,Grand-mère, parlez-nous de lui ! »2500 MAC-NAB 1856-1889, Les Souvenirs du populo, chanson. Chansons du chat noir 1890, Camille Baron, Maurice Mac-Nab Parodie de la célèbre chanson de Béranger, comme si Bonaparte et Boulanger étaient également sensibles au cœur du peuple Devant la photographie / D’un militaire à cheval / En habit de général / Songeait une femme attendrie. / Ses quatre petits-enfants / Disaient Quel est donc cet homme ? » / Mes fils, ce fut dans le temps / Un brave général comme / On n’en voit plus aujourd’hui / Son image m’est bien chère ! » » Le phénomène Boulanger aura duré trois ans. Mais le nationalisme revanchard va lui survivre dans les milieux de droite. Il porte un nom le boulangisme. Il a surtout un héritier, le populisme. En France, nous aurons Pierre Poujade et le poujadisme sous la Quatrième République, Le Pen et le Front national très présent sous la Cinquième. Citons aussi Silvio Berlusconi et Matteo Salvini Italie, Donald Trump États-Unis et Jair Bolsonaro Brésil. Le populisme est toujours le signe d’une démocratie malade où les hommes politiques s’adressent directement aux classes populaires, sans jouer le jeu des institutions républicaines. Certains historiens s’intéressant à ce phénomène ont trouvé un précédent en la personne de Louis-Napoléon Bonaparte. Mais l’on doit pouvoir remonter plus avant, aussi vrai que l’Histoire se répète fatalement, pour le pire et le meilleur. CHARLES PÉGUY Chrétien mystique, politicien atypique, poète écorché vif, penseur engagé, volontaire pour la Grande Guerre, il meurt aux premiers jours. Son nom reste, littéralement inclassable à l’image de l’homme. L’ordre, et l’ordre seul, fait en définitive la liberté. Le désordre fait la servitude. »2540 Charles PÉGUY 1873-1914, Cahiers de la Quinzaine, 5 novembre 1905 Rejeté de tous les groupes constitués, parce que patriote et dreyfusard, socialiste et chrétien, suspect à l’Église comme au parti socialiste, isolé par son intransigeance et ignoré jusqu’à sa mort du grand public, c’est l’un des rares intellectuels de l’époque échappant aux étiquettes. Voyant d’abord pour seul remède au mal universel l’établissement de la République socialiste universelle », il crée ses Cahiers de la Quinzaine pour y traiter tous les problèmes du temps, y publier ses œuvres et celles d’amis Romain Rolland, Julien Benda, André Suarès. La mystique républicaine, c’est quand on mourait pour la République, la politique républicaine, c’est à présent qu’on en vit. »2556 Charles PÉGUY 1873-1914, Notre jeunesse 1910 Et l’essentiel est que […] la mystique ne soit point dévorée par la politique à laquelle elle a donné naissance ». C’est dire si Péguy, l’humaniste qui se voudra toujours engagé jusqu’à sa mort aux premiers jours de la prochaine guerre, doit souffrir de la politique politicienne née sous la Troisième République. De plus en plus isolé, il témoigne à la fois contre le matérialisme du monde moderne, la tyrannie des intellectuels de tout parti, les manœuvres des politiques, la morale figée des bien-pensants. Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre !Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés ! »2588 Charles PÉGUY 1873-1914, Ève 1914 Deux derniers alexandrins d’un poème qui en compte quelque 8 000. Le poète appelle de tous ses vœux et de tous ses vers la génération de la revanche ». Lieutenant, il tombe à la tête d’une compagnie d’infanterie, frappé d’une balle au front, à Villeroy, le 5 septembre, veille de la bataille de la Marne. Un site lui est dédié, pour faire vivre sa mémoire. En exergue, une citation qui le définit bien Il y a quelque chose de pire qu’une mauvaise pensée. C’est d’avoir une pensée toute faire. » À méditer. JEAN MOULIN Chef de la Résistance rallié à de Gaulle, volontaire pour les missions difficiles, martyre panthéonisé avec tous les honneurs dus à sa mémoire, c’est un Nom qui symbolise l’héroïsme sous la Seconde guerre. Je ne savais pas que c’était si simple de faire son devoir quand on est en danger. »2748 Jean MOULIN 1899-1943, Lettre à sa mère et à sa sœur, 15 juin 1940. Vies et morts de Jean Moulin 1998, Pierre Péan Sous-préfet à 27 ans, chargé en 1936 d’acheminer vers l’Espagne républicaine le matériel de guerre soviétique, il est préfet d’Eure-et-Loir et refusera, le 17 juin, de signer une déclaration accusant de crimes de guerre les troupes coloniales engagées dans le secteur de Chartres. Révoqué comme franc-maçon par le gouvernement de Vichy en juillet, il rejoindra de Gaulle à Londres en automne. La mort ? Dès le début de la guerre, comme des milliers de Français, je l’ai acceptée. Depuis, je l’ai vue de près bien des fois, elle ne me fait pas peur. »2785 Jean MOULIN 1899-1943. Vies et morts de Jean Moulin 1998, Pierre Péan Préfet ayant refusé la politique de Vichy, il rejoint Londres à l’automne 1940. Parachuté en France dans les Alpilles le 1er janvier 1942 comme représentant du général de Gaulle », il a pour mission d’unifier les trois grands réseaux de résistants de la zone sud Combat, Libération, Franc-Tireur. Rôle difficile, vue l’extrême diversité des sensibilités, tendances et courants ; action à haut risque qu’il paiera bientôt de sa vie. Pierre Brossolette qui agit dans la zone nord, lui aussi arrêté, se suicidera pour ne pas livrer de secrets sous la torture. Bafoué, sauvagement frappé, la tête en sang, les organes éclatés, il atteint les limites de la souffrance humaine, sans jamais trahir un seul secret, lui qui les savait tous. »2796 Laure MOULIN 1892-1974, sœur et collaboratrice de Jean Moulin, témoignage. Antimémoires Le Miroir des limbes, volume I 1976, André Malraux Chargé d’unifier les réseaux de la zone sud, Jean Moulin a obtenu le ralliement des communistes, particulièrement précieux par leur discipline et leur expérience de la clandestinité. Le 27 mai 1943, il crée à Paris le Conseil national de la Résistance CNR, mais il est livré aux Allemands le 21 juin à Caluire Rhône, emprisonné au fort de Montluc à Lyon. Il meurt des suites de tortures, dans le train qui l’emmène en Allemagne. Battus, brûlés, aveuglés, rompus, la plupart des résistants n’ont pas parlé ; ils ont brisé le cercle du Mal et réaffirmé l’humain, pour eux, pour nous, pour leurs tortionnaires mêmes. »2718 Jean-Paul SARTRE 1905-1980, Situations II 1948 Prisonnier, libéré grâce à un subterfuge, Sartre l’éternel engagé participe à la constitution d’un réseau de résistance. Activité clandestine à haut risque en France, 30 000 résistants fusillés, plus de 110 000 déportés, dont la plupart morts dans les camps, ou à leur retour. Jean Moulin en fut à la fois le chef président du Conseil national de la Résistance, le héros, le martyr et le symbole. Pauvre roi supplicié des ombres, regarde ton peuple d’ombres se lever dans la nuit de juin constellée de tortures. »2797 André MALRAUX 1901-1976, Discours au Panthéon, lors du transfert des cendres de Jean Moulin, 19 décembre 1964. André Malraux et la politique L’être et l’Histoire 1996, Dominique Villemot Le corps fut renvoyé à Paris en juillet 1943, incinéré au Père-Lachaise. Ses cendres supposées telles ont été transférées au Panthéon. Cette panthéonisation », reconnaissance suprême de la patrie à ses héros, est l’acte final des célébrations du 20e anniversaire de la Libération. ROBERT BRASILLACH C’est véritablement un cas ». Peut-on lui rendre honneur ? Oui, au titre de son indiscutable talent, reconnu par ses pairs et même par de Gaulle ! Mais le général refuse sa grâce au collaborateur et au délateur responsable de nombreux morts durant la guerre. En finira-t-on avec les relents de pourriture parfumée qu’exhale encore la vieille putain agonisante, la garce vérolée, fleurant le patchouli et la perte blanche, la République toujours debout sur son trottoir. Elle est toujours là, la mal blanchie, elle est toujours là, la craquelée, la lézardée, sur le pas de sa porte, entourée de ses michés et de ses petits jeunots, aussi acharnés que les vieux. Elle les a tant servis, elle leur a tant rapporté de billets dans ses jarretelles ; comment auraient-ils le cœur de l’abandonner, malgré les blennorragies et les chancres ? Ils en sont pourris jusqu’à l’os. »2781 Robert BRASILLACH 1909-1945, Je suis partout, 7 février 1942 Écrivain de talent et d’autant plus responsable, il s’est engagé politiquement dans l’entre-deux-guerres avec l’Action française le mouvement et le journal, mais c’est comme rédacteur en chef de Je suis partout qu’il va se faire remarquer. Il prône un fascisme à la française ». Sa haine du Front populaire et de la République va de pair avec celle des juifs, notamment ceux au pouvoir, comme Léon Blum et Georges Mandel né Rothschild, ex ministre et député, dont il demande régulièrement la mise à mort et qui sera assassiné par la Milice française, en juillet 1944. Il est un autre droit que nous revendiquons, c’est d’indiquer ceux qui trahissent. »2794 Robert BRASILLACH 1909-1945. La Force de l’âge 1960, Simone de Beauvoir La délation est la forme la plus infâme, parce que la plus lâche de la collaboration. À côté des trafiquants trop contents de faire des affaires sur le marché noir, d’autres ont des raisons politiques. Faiblesse devant le vainqueur admiré, calcul pour être du bon » côté au jour de la victoire escomptée, mais aussi et plus rarement, conviction idéologique mêlant souvent anticommunisme, antisémitisme, anglophobie. Brasillach est de ce camp. Passé de L’Action française à Je suis partout, il participe à la chasse aux résistants, de plus en plus nombreux et organisés, qui se radicalise en janvier 1943 avec la Milice, police supplétive de volontaires chargés de les traquer. Le Service du travail obligatoire STO institué en février va augmenter considérablement le nombre de ceux qui trahissent » pour ne pas aller travailler en Allemagne. Dénoncés frénétiquement par Brasillach et ses amis, la résistance devient une activité clandestine à haut risque. Dans les lettres, comme en tout, le talent est un titre de responsabilité. »2821 Charles de GAULLE 1890-1970, refusant la grâce de Robert Brasillach. Mémoires de Guerre, tome III, Le Salut, 1944-1946 1959, Charles de Gaulle Sur 2 071 recours présentés, de Gaulle en acceptera 1 303. Condamné à mort pour intelligence avec les Allemands, Brasillach est fusillé le 6 février 1945. Ses convictions hitlériennes ne font aucun doute et son journal Je suis partout en témoigne abondamment. Le procès est bâclé, de nombreux confrères tentent de le sauver. Mais le PC voulait la tête de l’homme responsable de la mort de nombreux camarades et de Gaulle ne lui pardonnait pas celle de Georges Mandel, résistant exécuté par la Milice après les appels au meurtre signés, entre autres, par Brasillach. Et ceux que l’on mène au poteauDans le petit matin glacé,Au front la pâleur des cachots,Au cœur le dernier chant d’Orphée,Tu leur tends la main sans un mot,O mon frère au col dégrafé. »2822 Robert BRASILLACH 1909-1945, Poèmes de Fresnes, Chant pour André Chénier Référence à Chénier, poète exécuté sous la Révolution à la fin de la Terreur, presque au même âge. Jean Luchaire journaliste, directeur des Nouveaux Temps et Jean Hérold-Paquis de Radio-Paris subiront le même sort, parmi quelque 3 000 condamnés. L’histoire est écrite par les vainqueurs. »2826 Robert BRASILLACH 1909-1945, Les Frères ennemis dialogue écrit à Fresnes fin 1944, posthume … Écrite par les vivants plus que par les vainqueurs et Brasillach ne sera pas fusillé pour cause de défaite, mais de trahison. L’histoire de la Seconde Guerre mondiale, cette page d’histoire de France encore si sensible et même brûlante, fut d’ailleurs réécrite tant de fois que les vaincus ont eu, légitimement, le droit de témoigner aux côtés des vainqueurs. PIERRE MENDÈS FRANCE Premier ministre sous la Quatrième République, personnalité atypique du monde politique, il ne résiste à l’opposition que 7 mois et 7 jours, mais reste une référence indiscutable pour les socialistes français en mal de repères. Gouverner, c’est choisir. »2885 Pierre MENDÈS FRANCE 1907-1982, Discours à l’Assemble nationale, 3 juin 1953. Gouverner, c’est choisir 1958, Pierre Mendès France La cause fondamentale des maux qui accablent le pays, c’est la multiplicité et le poids des tâches qu’il entend assumer à la fois reconstruction, modernisation et équipement, développement des pays d’outre-mer, amélioration du niveau de vie et réformes sociales, exportations, guerre en Indochine, grande et puissante armée en Europe, etc. Or, l’événement a confirmé ce que la réflexion permettait de prévoir on ne peut pas tout faire à la fois. Gouverner, c’est choisir, si difficiles que soient les choix. » Cette formule empruntée involontairement ? au duc Gaston de Lévis Maximes politiques, 1808 accompagne désormais l’homme politique bientôt au pouvoir. Quelques jours avant, dans le premier numéro de L’Express 16 mai 1953, Mendès France écrit À prétendre tout faire, nous n’avons réussi qu’à détériorer notre monnaie, sans satisfaire aucun de nos objectifs […] Ce n’est pas sur des conférences diplomatiques, mais sur la vigueur économique que l’on fait une grande nation. » Quelques mois plus tard, devant la déroute française dans la guerre d’Indochine, il ajoutera Nous sommes en 1788 », cependant que Paul Reynaud voit en la France l’homme malade de l’Europe ». La démocratie, c’est d’abord un état d’esprit. »2890 Pierre MENDÈS FRANCE 1907-1982, La République moderne 1962 Le gouvernement Laniel est renversé sur la question de l’Indochine. Mendès France le remplace, annonçant qu’il obtiendra un cessez-le-feu avant le 20 juillet. Sa déclaration d’investiture à l’Assemblée nationale 17 juin 1954 est plutôt musclée Je ferai appel […] à des hommes capables de servir, à des hommes de caractère, de volonté et de foi. Je le ferai sans aucune préoccupation de dosage […] Il n’y aura pas de ces négociations interminables que nous avons connues ; je n’admettrai ni exigence ni vetos. Le choix des ministres, en vertu de la Constitution, appartient au président du Conseil investi, et à lui seul. Je ne suis pas disposé à transiger sur les droits que vous m’auriez donnés par votre investiture. » Bref, Mendès France refuse d’emblée de devenir un homme du système. Dans son cabinet, il prend des gaullistes le général Koenig à la Défense, des radicaux François Mitterrand à l’Intérieur. Edgar Faure reste aux Finances et Mendès prend le portefeuille des Affaires étrangères. En ce jour anniversaire qui est aussi celui où j’assume de si lourdes responsabilités, je revis les hautes leçons de patriotisme et de dévouement au bien public que votre confiance m’a permis de recevoir de vous. »2891 Pierre MENDÈS FRANCE 1907-1982, Télégramme au général de Gaulle, 18 juin 1954. Mendès France au pouvoir 1965, Pierre Rouanet Son premier jour au pouvoir coïncide avec celui de l’Appel, il y a quatorze. Mendès France avoue alors avoir trois grands hommes comme modèle Poincaré, Blum et de Gaulle. Le troisième homme est sceptique sur les chances du nouveau chef du gouvernement Vous verrez, ils ne vous laisseront pas aller jusqu’au bout », lui dira-t-il le 13 octobre. Sept mois et dix-sept jours le titre donné par Mendès France au recueil de ses discours dit très exactement la durée de son ministère, renversé le 5 février 1955. Il cherche plutôt à trancher qu’à s’accommoder, ce qui lui vaut, surtout auprès des jeunes, un prestige certain. Quand on l’aura vu à l’œuvre, on s’apercevra qu’il est dans sa manière de prendre les problèmes l’un après l’autre, en quelque sorte à la gorge, sans s’y attarder. Son attitude est celle d’un liquidateur. »2892 André SIEGFRIED 1875-1959, Préface à l’Année politique 1954 Mendès France prend l’affaire indochinoise à bras-le-corps il s’engage à en finir avant le 20 juillet, sinon il démissionnera. Les accords de Genève sont signés dans la nuit du 20 au 21 juillet 1954. Le Vietnam est partagé en deux zones, le Nord étant abandonné au communisme et à l’influence chinoise et bientôt soviétique, l’influence occidentale et bientôt américaine prévalant dans le Sud. Six ans et demi de guerre, 3 000 milliards de francs, 92 000 morts et 114 000 blessés », tel est le bilan de cette guerre, dressé par Jacques Fauvet La Quatrième République. Le Figaro parle d’un deuil » pour la France, mais l’opinion soulagée sait d’abord gré à Mendès d’avoir sorti le pays de ce guêpier où les USA vont s’enliser. Plus tard, il sera pourtant traité de bradeur ». Les hommes passent, les nécessités nationales demeurent. »2896 Pierre MENDÈS FRANCE 1907-1982, Assemblée Nationale, nuit du 4 au 5 février 1955. Pierre Mendès France 1981, Jean Lacouture L’Assemblée vient de lui refuser la confiance 319 voix contre 273 par peur d’une politique d’ aventure » en Afrique du Nord. On l’accuse, dans son discours de Carthage, d’avoir encouragé la rébellion des Tunisiens et des fellagas d’Algérie, alors qu’il est partisan déclaré de l’Algérie française dont il a renforcé la défense. Contrairement aux usages et sous les protestations, il remonte à la tribune pour justifier son action. Mendès France est resté populaire dans le pays, mais de nombreux parlementaires déplorent ses positions cassantes, aux antipodes des compromis et compromissions de la Quatrième. Le syndicat » des anciens présidents du Conseil et anciens ministres lui reproche de ne pas jouer le jeu politicien et de semer le trouble dans l’hémicycle et ses coulisses. De Gaulle l’avait prédit Ils ne vous laisseront pas faire ! » Mendès France, pour la dernière fois à la tribune, défie les députés Ce qui a été fait pendant ces sept ou huit mois, ce qui a été mis en marche dans ce pays ne s’arrêtera pas… » Il faudrait être bien inattentif pour croire que l’action de Pierre Mendès France fut limitée aux quelque sept mois et dix-sept jours passés de juin 1954 à février 1955 à la tête du gouvernement de la République. Un été, un automne, quelques jours. L’Histoire ne fait pas ces comptes-là. Léon Blum pour un an, Gambetta et Jaurès, pour si peu, pour jamais, pour toujours. »2897 François MITTERRAND 1916-1996, Cour d’honneur de l’Assemblée nationale, Discours du 27 octobre 1982. Le Pouvoir et la rigueur Pierre Mendès France, François Mitterrand 1994, Raymond Krakovitch Tel sera l’hommage solennel de Mitterrand, devenu président de la République, à la mort de Pierre Mendès France. JACQUES CHABAN-DELMAS Brillant Premier ministre qui lance l’idée d’une nouvelle société », il échoue à faire vraiment couple avec Pompidou, président plus pragmatique que social. Sportif aguerri, il se précipite trop vite dans la course à sa succession. Il se rattrapera un peu comme maire de Bordeaux pendant 48 ans avec cumul des mandats. Dans ce régime, tout ce qui est réussi l’est grâce au président de la République. Tout ce qui ne va pas est imputé au Premier ministre… mais je ne l’ai compris qu’au bout d’un certain temps. »2937 Jacques CHABAN-DELMAS 1915-2000. Vie politique sous la Cinquième République 1981, Jacques Chapsal C’est une loi qui se dégage à mesure que passent les gouvernements les fusibles » sont faits pour sauter. Chaban-Delmas l’a éprouvé en étant le second » de Pompidou – président de la République après de Gaulle – sortant vaincu de ce duo qui tourna au duel et injustement à son désavantage. Pourtant, la cote de popularité d’un président peut chuter au-dessous de celle de son Premier ministre durablement, dans le cas de Sarkozy et au terme d’un référendum manqué de Gaulle ou d’une élection perdue Giscard d’Estaing, il lui arrive de céder sa place à la tête de l’État. Nous ne parvenons pas à accomplir des réformes autrement qu’en faisant semblant de faire des révolutions. »2953 Jacques CHABAN-DELMAS 1915-2000, Assemblée nationale, 16 septembre 1969. Mémoires pour demain 1997, Jacques Chaban-Delmas Le Premier ministre songe naturellement aux événements de Mai 68, constatant de façon plus générale que la société française n’est pas encore parvenue à évoluer autrement que par crises majeures ». C’est un mal français, maintes fois diagnostiqué. Contre les conservatismes » et les blocages », il propose sa nouvelle société ». La guerre des Républiques est terminée. »3113 Jacques CHABAN-DELMAS 1915-2000, présentant son gouvernement le 23 juin 1969. La Guerre de succession 1969, Roger-Gérard Schwartzenberg L’UDR soutient ce baron » du gaullisme, résistant pendant la guerre et en même temps un des piliers de la Quatrième République. On lui passe même quelques gestes d’ouverture en direction d’anciens adversaires du Général. Mais la guerre n’est pas finie entre les partis ! Et les tentatives de séduction du très séduisant Premier ministre vont échouer. Les centristes d’opposition continueront de dénoncer la dictature de l’ État UDR », tandis que la gauche socialiste et communiste fourbit les armes de l’union qui fera un jour sa force. Il y a peu de moments dans l’existence d’un peuple où il puisse autrement qu’en rêve se dire Quelle est la société dans laquelle je veux vivre ? J’ai le sentiment que nous abordons un de ces moments. Nous pouvons donc entreprendre de construire une nouvelle société. »3116 Jacques CHABAN-DELMAS 1915-2000, Discours à l’Assemblée nationale, 16 septembre 1969 Aucun discours parlementaire de Premier ministre n’eut plus de retentissement, sous la Cinquième République. La dénonciation du conservatisme » et des blocages » de la société française annonce un programme ambitieux de réformes – maître mot des quatre prochains présidents, mais malheureusement pas de Pompidou, aux priorités plus concrètes que sociétales ! Chaban-Delmas, dans L’Ardeur 1975, donne de sa nouvelle société » deux définitions L’une politique, c’est une société qui tend vers plus de justice et de liberté […] L’autre sociologique, c’est une société où chacun considère chacun comme un partenaire ». Comment ne pas souscrire à un tel projet ? Tandis que vous parliez, je vous regardais et je ne doutais pas de votre sincérité. Et puis, je regardais votre majorité et je doutais de votre réussite. »3117 François MITTERRAND 1916-1996, Assemblée nationale, 16 septembre 1969. La Présidence de Georges Pompidou essai sur le régime présidentialiste français 1979, Françoise Decaumont L’opposition ne fait pas mauvais accueil au programme du Premier ministre, sur le principe, mais elle doute de sa réalisation On ne bâtit pas une nouvelle société sur des vœux pieux. » Les difficultés viendront surtout du scepticisme du président de la République, aux convictions économiques plus que sociologiques. On ne tire pas sur une ambulance. »3149 Françoise GIROUD 1916-2003, L’Express, 24 avril 1974 Le trait d’une charité sans pitié vise Chaban-Delmas dont la cote ne cesse de baisser dans les sondages, début mai 1974. Jeudi 4 avril, avant même la fin du discours d’hommage d’Edgar Faure, président de l’Assemblée nationale, au président défunt, Chaban-Delmas avait annoncé par un communiqué Ayant été trois ans Premier ministre sous la haute autorité de Georges Pompidou et dans la ligne tracée par le général de Gaulle, j’ai décidé d’être candidat à la présidence de la République. Je compte sur l’appui des formations politiques de la majorité présidentielle. » Candidature lancée trop tôt ? Pas assez solide face à Mitterrand à gauche ? Concurrencée par d’autres candidats à droite ? Et Françoise Giroud de commenter Alors que MM. Giscard d’Estaing et Mitterrand provoquent des mouvements intenses d’admiration ou d’hostilité, parfois d’admiration et d’hostilité mêlées, on a envie de demander, sans acrimonie, à M. Chaban-Delmas Et vous, qu’est-ce que vous faites au juste dans cette affaire ? » Il encombre. Comment le battant a-t-il viré à l’ancien combattant ? » Il redevient député, président de l’Assemblée nationale, toujours sportif et hyperactif, et il retrouve sa mairie de Bordeaux – surnommée la belle endormie ». Âgé de 80 ans et presque toujours aussi jeune d’allure, il soutient la candidature d’Alain Juppé et se retire de la vie politique qu’il aura tant aimée, avec ce constant désir de plaire qui irrita Pompidou. ALAIN JUPPÉ Premier ministre de Chirac qui le désigne comme le meilleur d’entre nous », homme de droite toujours droit dans ses bottes, il paie pour ceux de son camp en assumant diverses malversations. Après une carrière politique presque aussi longue que Chaban, il lui succède à la mairie de Bordeaux pour dix ans et un marathon des travaux qui réveille la belle endormie ». Je suis droit dans mes bottes et je crois en la France. »3336 Alain JUPPÉ né en 1945, Premier ministre, TF1, 6 juillet 1995 Un mois après son entrée en fonction, le plus fidèle ami de Chirac doit répondre sur le loyer de son appartement parisien, trop bas pour être honnête, et la baisse de loyer demandée pour l’appartement de son fils Laurent. Affaire dérisoire, mais symbolique. Juppé devient vite impopulaire sa cote d’avenir » passe de 63 % en juin à 37 % en novembre baromètre TNS Sofres pour Le Figaro Magazine. Sa défense paraît rigide, illustrée par l’expression qui le poursuivra empruntée à la cavalerie militaire Je suis droit dans mes bottes. » Autrement dit, je ne plie pas, j’ai ma conscience pour moi. En désaccord avec son ministre de l’Économie et des Finances, Alain Madelin, il doit faire face à sa démission, le 26 août 1995, et le remplace par Jean Arthuis. Mais il reste Premier ministre, droit dans ses bottes. En 1996, André Santini, député de droite et grand faiseur de petites phrases, reçoit le prix d’excellence décerné par le très sérieux Club de l’humour politique, pour avoir déclaré Alain Juppé voulait un gouvernement ramassé, il n’est pas loin de l’avoir. » Un Premier ministre, on le lèche, on le lâche, on le lynche ! »3383 Alain JUPPÉ né en 1945. La Malédiction Matignon 2006, Bruno Dive, Françoise Fressoz Il a vécu un court état de grâce, Premier ministre 1995-1997 et maire de Bordeaux. Reconnu plusieurs fois par Chirac comme le meilleur d’entre les hommes de droite », il se rend vite impopulaire par le projet de réforme des retraites, le gel des salaires des fonctionnaires, la déroute des Juppettes huit femmes débarquées du gouvernement après quelques mois d’exercice et cette raideur de l’homme qui se dit lui-même droit dans ses bottes. » Mais le pire est à venir. En 1998, il est mis en examen pour abus de confiance, recel d’abus de biens sociaux et prise illégale d’intérêt » – pour des faits commis en tant que secrétaire général du RPR et maire adjoint de Paris aux finances, de 1983 à 1995. Le 30 janvier 2004, le tribunal correctionnel de Nanterre le condamne lourdement dix-huit mois de prison avec sursis dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris et dix ans d’inéligibilité. L’appel interjeté suspend l’application de la peine, jusqu’à l’arrêt de la cour d’appel. Le 1er décembre 2004, condamnation réduite à quatorze mois de prison avec sursis et un an d’inéligibilité. Juppé vit une traversée du désert qui passe par le Canada… Nombre de commentateurs bien informés estiment qu’il paie pour Chirac, reconnu comme responsable moralement. Il finira en beauté, maire de Bordeaux, succédant à Chaban et lui rendant élégamment hommage en baptisant l’un des grands travaux que lui doit la ville le fameux pont Jacques Chaban-Delmas qui relie les deux rives de la Garonne. LIONEL JOSPIN Premier ministre socialiste de cohabitation avec Chirac président de droite, il se révèle beau joueur dans l’échec majeur de la gauche aux présidentielles de 2002. Son retrait définitif de la vie politique devient paradoxalement son premier titre de gloire. La nation est non seulement la réalité vivante à laquelle nous sommes tous attachés, mais surtout le lieu où bat le cœur de la démocratie, l’ensemble où se nouent les solidarités les plus profondes. La France, ce n’est pas seulement le bonheur des paysages, une langue enrichie des œuvres de l’esprit ; c’est d’abord une histoire. »3343 Lionel JOSPIN né en 1937, Premier ministre, Déclaration de politique générale, 19 juin 1997 La cohabitation va durer cinq ans – un record sous la Cinquième République. Le pouvoir du chef de l’État s’en trouve limité, mais sur la scène internationale, avec les deux têtes de l’exécutif présentes aux grands rendez-vous, la France parle d’une seule voix, la sienne. Pour commencer à écrire la suite de l’histoire de la France, Jospin forme un gouvernement d’union, centré sur quelques proches Martine Aubry, Claude Allègre, Dominique Strauss-Kahn. Principale promesse de campagne les 35 heures payées 39 pour favoriser le partage du travail. C’est la mesure la plus populaire, la plus contestée aussi. Martine Aubry, ministre de l’Emploi et de la Solidarité, reste à jamais la Dame des 35 heures », même si Strauss-Kahn fut le premier à préconiser la réduction du temps de travail RTT. Ancien professeur, Jospin affirme que l’école est le berceau de la République » et son ami Allègre s’attelle à la réforme, souhaitant dégraisser le mammouth ». Mot maladroit qui entraînera sa démission. Pas de parcours politique sans échec. Celui de Jospin aux prochaines présidentielles sera particulièrement cruel – et sans doute injuste. J’assume pleinement la responsabilité de cet échec et j’en tire les conclusions, en me retirant de la vie politique. »3373 Lionel JOSPIN né en 1937, Déclaration du 21 avril 2002, au soir du premier tour des présidentielles La gauche est hors-jeu et littéralement KO, la présidentielle va se jouer à droite toute. Lionel Jospin se présente à la télévision et devant ses troupes, visage défait, voix blanche Le résultat du premier tour de l’élection présidentielle vient de tomber comme un coup de tonnerre. Voir l’extrême droite représenter 20 % des voix dans notre pays et son principal candidat affronter celui de la droite au second tour est un signe très inquiétant pour la France et pour notre démocratie. Ce résultat, après cinq années de travail gouvernemental entièrement voué au service de notre pays, est profondément décevant pour moi et ceux qui m’ont accompagné dans cette action. Je reste fier du travail accompli. Au-delà de la démagogie de la droite et de la dispersion de la gauche qui ont rendu possible cette situation, j’assume pleinement la responsabilité de cet échec et j’en tire les conséquences en me retirant de la vie politique après la fin de l’élection présidentielle. » Ce 21 avril est l’une des dates chocs des années 1990-2020 - avec les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, le Non au référendum sur l’Europe 29 mai 2005, l’attentat hyper-médiatique contre Charlie Hebdo 7 janvier 2015. Ma mission à moi était de conduire la gauche à la victoire présidentielle. Et là, on pourrait dire que l’équipage de la gauche a abandonné son capitaine. »3375 Lionel JOSPIN né en 1937, à propos du 21 avril 2002. Lionel raconte Jospin 2010, Lionel Jospin Le bilan du parti socialiste était honorable, mais son programme désespérément vide aucune proposition propre à faire rêver les classes populaires déboussolées ou les jeunes avides d’idéal. La campagne, mal conduite, devint une foire d’empoigne entre les 16 candidats, huit à gauche, huit à droite, chacun s’efforçant d’engranger un maximum de voix en prévision des élections législatives de juin. Le 21 avril fut parfois analysé comme une nouvelle poussée d’extrême-droite, surtout ressenti comme tel par la jeunesse qui manifestait en masse, vent debout. C’est davantage une démobilisation de la droite traditionnelle et plus encore de la gauche socialiste. Le PS va profiter de ce choc citoyen, des remords du corps électoral et d’un réflexe de vote utile pour s’affirmer comme la seule force autour de laquelle la gauche peut s’organiser. En attendant, Chirac est réélu avec l’alliance de toute la classe politique hormis les extrêmes droite et gauche et un score sans précédent 82,21 % des voix.
Jecrois que les êtres très profondément aimés réfléchissent une part de l'amour qu'ils inspirent. Choisis, élus, ils se sentent uniques. Le boomerang de l'amour, en quelque sorte. - Une citation de Gisèle Halimi . en partenariat avec. Citation du Jour . X ; Accueil; Tops; Auteurs; Thèmes; Propositions; Proposez une citation MENU . Accueil. Auteurs. G. Gisèle Halimi . Thèmes de
A Georges et Claude POMPIDOU …Sicut et nos dimittimus debitoribus nostris » I. Seigneur Jésus, à la fin de ce livre que je T’offre comme un ciboire de souffrances Au commencement de la Grande Année, au soleil de Ta paix sur les toits neigeux de Paris - Mais je sais bien que le sang de mes frères rougira de nouveau l’Orient jaune, sur les bords de l’Océan Pacifique que violent tempêtes et haines Je sais bien que ce sang est la libation printanière dont les Grands Publicains depuis septante années engraissent les terres d’Empire Seigneur, au pied de cette croix – et ce n’est plus Toi l’arbre de douleur, mais au-dessus de l’Ancien et du Nouveau Monde l’Afrique crucifiée Et son bras droit s’étend sur mon pays, et son côté gauche ombre l’Amérique Et son cœur est Haïti cher, Haïti qui osa proclamer l’Homme en face du Tyran Au pied de mon Afrique crucifiée depuis quatre cents ans et pourtant respirante Laisse-moi Te dire Seigneur, sa prière de paix et de pardon. II. Seigneur Dieu, pardonne à l’Europe blanche ! Et il est vrai, Seigneur, que pendant quatre siècles de lumières elle a jeté la bave et les abois de ses molosses sur mes terres Et les chrétiens, abjurant Ta lumière et la mansuétude de Ton cœur On éclairé leurs bivouacs avec mes parchemins, torturé mes talbés, déporté mes docteurs et mes maîtres-de-science. Leur poudre a croulé dans l’éclair la fierté des tatas et des collines Et leurs boulets ont traversé les reins d’empires vastes comme le jour clair, de la Corne de l’Occident jusqu’à l’Horizon oriental Et comme des terrains de chasse, ils ont incendié les bois intangibles, tirant Ancêtres et génies par leur barbe paisible. Et ils ont fait de leur mystère la distraction dominicale de bourgeois somnambules. Seigneur, pardonne à ceux qui ont fait des Askia des maquisards, de mes princes des adjudants De mes domestiques des boys et de mes paysans des salariés, de mon peuple un peuple de prolétaires. Car il faut bien que Tu pardonnes à ceux qui ont donné la chasse à mes enfants comme à des éléphants sauvages. Et ils les ont dressés à coups de chicotte, et ils ont fait d’eux les mains noires de ceux dont les mains étaient blanches. Car il faut bien que Tu oublies ceux qui ont exporté dix millions de mes fils dans les maladreries de leurs navires Qui en ont supprimé deux cents millions. Et ils m’ont fait une vieillesse solitaire parmi la forêt de mes nuits et la savane de mes jours. Seigneur la glace de mes yeux s’embue Et voilà que le serpent de la haine lève la tête dans mon cœur, ce serpent que j’avais cru mort… III. Tue-le Seigneur, car il me faut poursuivre mon chemin, et je veux prier singulièrement pour la France. Seigneur, parmi les nations blanches, place la France à la droite du Père. Oh ! je sais bien qu’elle aussi est l’Europe, qu’elle m’a ravi mes enfants comme un brigand du Nord des boeufs, pour engraisser ses terre à cannes et coton, car la sueur nègre est fumier. Qu’elle aussi a porté la mort et le canon dans mes villages bleus, qu’elle a dressé les miens les uns contre les autres comme des chiens se disputant un os Qu’elle a traité les résistants de bandits, et craché sur les têtes-aux-vastes-desseins. Oui, Seigneur, pardonne à la France qui dit bien la voie droite et chemine par les sentiers obliques Qui m’invite à sa table et me dit d’apporter mon pain, qui me donne de la main droite et de la main gauche enlève la moitié. Oui Seigneur, pardonne à la France qui hait les occupants et m’impose l’occupation si gravement Qui ouvre des voies triomphales aux héros et traite ses Sénégalais en mercenaires, faisant d’eux les dogues noirs de l’Empire Qui est la République et livre les pays aux Grands-Concessionnaires Et de ma Mésopotamie, de mon Congo, ils ont fait un grand cimetière sous le soleil blanc. IV. Ah ! Seigneur, éloigne de ma mémoire la France qui n’est pas la France, ce masque de petitesse et de haine sur le visage de la France Ce masque de petitesse et de haine pour qui je n’ai que haine – mais je peux bien haïr le Mal Car j’ai une grande faiblesse pour la France. Bénis de peuple garrotté qui par deux fois sut libérer ses mains et osa proclamer l’avènement des pauvres à la royauté Qui fit des esclaves du jour des hommes libres égaux fraternels Bénis ce peuple qui m’a apporté Ta Bonne Nouvelle, Seigneur, et ouvert mes paupières lourdes à la lumière de la foi. Il a ouvert mon cœur à la connaissance du monde, me montrant l’arc-en-ciel des visages neufs de mes frères. Je vous salue mes frères toi Mohamed Ben Abdallah, toi Razafymahatratra, et puis toi là-bas Pham-Manh-Tuong, vous des mers pacifiques et vous des forêts enchantées Je vous salue tous d’une cœur catholique. Ah ! je sais bien que plus d’un de Tes messagers a traqué mes prêtres comme gibier et fait un grand carnage d’images pieuses. Et pourtant on aurait pu s’arranger, car elles furent, ces images, de la terre à Ton ciel l’échelle de Jacob La lampe au beurre clair qui permet d’attendre l’aube, les étoiles qui préfigurent le soleil. Je sais que nombre de Tes missionnaires ont béni les armes de la violence et pactisé avec l’or des banquiers Mais il faut qu’il y ait des traîtres et des imbéciles. V. O bénis ce peuple, Seigneur, qui cherche son propre visage sous le masque et a peine à le reconnaître Qui Te cherche parmi le froid, parmi la faim qui lui rongent os et entrailles Et la fiancée pleure sa viduité, et le jeune homme voit sa jeunesse cambriolée Et la femme lamente oh ! l’œil absent de son mari, et la mère cherche le rêve de son enfant dans les gravats. O bénis ce peuple qui rompt ses liens, bénis ce peuple aux abois qui fait front à la meute boulimique des puissants et des tortionnaires. Et avec lui tous les peuples d’Europe, tous les peuples d’Asie tous les peuples d’Afrique et tous les peuples d’Amérique Qui suent sang et souffrances. Et au milieu de ces millions de vagues, vois les têtes houleuses de mon peuple. Et donne à leurs mains chaudes qu’elles enlacent la terre d’une ceinture de mains fraternelles. DESSOUS L’ARC-EN-CIEL DE TA PAIX. Paris, janvier 1945 Léopold Sédar Senghor Paix
Lacible de cette machination n’est autre que Georges Pompidou, alors ancien Premier ministre et dauphin présumé du président fondateur de la Ve République, le général de Gaulle. La victime collatérale est son épouse adorée, Claude, avec laquelle il forme un couple fusionnel. L’affaire commence le 1er octobre 1968 avec la découverte d’un corps décomposé, enveloppé dans une
Depuis la seconde guerre mondiale, l'histoire des relations franco-allemandes est souvent personnifiée. Dans ce contexte, Willy Brandt et Georges Pompidou... Lire la suite 29,00 € Neuf Ebook Téléchargement immédiat 14,99 € Grand format Expédié sous 3 à 6 jours 29,00 € Expédié sous 3 à 6 jours Livré chez vous entre le 25 août et le 30 août Depuis la seconde guerre mondiale, l'histoire des relations franco-allemandes est souvent personnifiée. Dans ce contexte, Willy Brandt et Georges Pompidou restent souvent dans l'ombre de couples plus connus. Alors que Brandt est plutôt associé à la nouvelle Ostpolitik, Pompidou est davantage considéré comme le successeur plutôt effacé du charismatique Président de Gaulle occupé à abandonner des positions gaullistes classiques. L'opinion publique contemporaine jugeait que la politique européenne était à l'arrêt et les études scientifiques parlaient beaucoup " d'eurosclérose " dans les années 1970. L'ouvrage de Claudia Hiepel contredit ces interprétations liées à la politique européenne menée par Brandt et Pompidou. En s'appuyant sur des sources historiques aussi nombreuses que variées, elle développe l'importance des relations bilatérales dans le processus d'intégration pendant cette phase difficile mais décisive. Malgré toutes les difficultés que la construction de l'Europe devait surmonter à cette époque, entre 1969 et 1974 des décisions essentielles ont été prises pour l'avenir des relations franco-allemandes et l'intégration européenne façonnant toujours le visage de la Communauté européenne. L'action de Brandt et de Pompidou est réinterprétée en montrant qu'ils ont joué ce rôle moteur attribué aux relations franco-allemandes. L'ouvrage a reçu les prix " Emile et Aline Mavrisch " et " Willy-Brandt " en 2011 et a été distingué parle prix parlementaire franco-allemand en 2015. Date de parution 01/01/2016 Editeur Collection ISBN 978-2-7574-1156-8 EAN 9782757411568 Présentation Broché Nb. de pages 313 pages Poids Kg Dimensions 15,9 cm × 24,0 cm × 1,6 cm Depuis la seconde guerre mondiale, l'histoire des relations franco-allemandes est souvent personnifiée. Dans ce contexte, Willy Brandt et Georges Pompidou restent souvent dans l'ombre de couples plus connus. Alors que Brandt est plutôt associé à la nouvelle Ostpolitik, Pompidou est davantage considéré comme le successeur plutôt effacé du... Biographie de Claudia Hiepel Claudia Hiepel docteure et agrégée d'histoire, collaboratrice scientifique de l'université Duisburg-Essen, est spécialiste des relations internationales européennes des XIXe et XXe siècles.
Auprogramme : 11h : Début du Brunch Penderie : DJ set, brunch, vide dressing ! 16h : Quizz sur les années 90 (blind test, n’oubliez pas les paroles, culture générale). Vous pourrez gagnez des bières du réservoir et des gourmandises Mary Cherry ! DJ Set par Reflex, Quentin Claude et Steve Makler ! Invites tes amis à bruncher et à faire du shopping à prix réduit, on vous attend
Passer au contenu principal Synopsis A propos du livre 160pages. in8. Broché. Les informations fournies dans la section Synopsis » peuvent faire référence à une autre édition de ce titre. Quatrième de couverture Dans ses mémoires, l'épouse de l'ancien chef d'Etat sort pour la première fois de son silence et nous livre des souvenirs aussi passionnants que bouleversants. Elle parle de celui qui, fidèle compagnon du général de Gaulle, avait pour ambition de " moderniser la France ", s'attachant particulièrement aux questions de l'Europe, de l'emploi, de la culture et de l'environnement. Au-delà des souvenirs de la vie officielle, Mme Pompidou évoque, avec franchise et passion, des sujets qui lui tiennent à coeur l'art contemporain, sa fondation, la famille, la foi. Cet ouvrage nous permet de découvrir le destin d'un couple confronté à l'épreuve du pouvoir, mais aussi celui d'une femme pudique et indépendante. Les informations fournies dans la section A propos du livre » peuvent faire référence à une autre édition de ce titre. Autres éditions populaires du même titre Meilleurs résultats de recherche sur AbeBooks Image fournie par le vendeur Image fournie par le vendeur Image d'archives Elan du coeur Pompidou/Claude ISBN 10 2259187188 ISBN 13 9782259187183 Ancien ou d'occasion Quantité disponible 2 Description du livre Befriedigend/Good Durchschnittlich erhaltenes Buch bzw. Schutzumschlag mit Gebrauchsspuren, aber vollständigen Seiten. / Describes the average WORN book or dust jacket that has all the pages present. N° de réf. du vendeur M02259187188-G Plus d'informations sur ce vendeur Contacter le vendeur Image fournie par le vendeur Image d'archives Image fournie par le vendeur Image fournie par le vendeur Image d'archives Image d'archives Image d'archives L'élan du coeur Pompidou, Claude Edité par Plon 1997 ISBN 10 2259187188 ISBN 13 9782259187183 Ancien ou d'occasion Paperback Quantité disponible 1 Description du livre Paperback. Etat OKAZ. - Nombre de pages 160 p. - Langue fre - Genre Biographies historiques. N° de réf. du vendeur O38212-666 Plus d'informations sur ce vendeur Contacter le vendeur autres exemplaires de ce livre sont disponibles Afficher tous les résultats pour ce livre
Undocumentaire inédit, signé Pierre Hurel, raconte ce mercredi 21 septembre à 20h35 sur France 3 les quatre années et demie du couple Pompidou à l’Élysée, depuis la
Les différents services, mouvements et associations du diocèse travaillent de concert à l’animation festive de cette journée. Ce sont 60 stands qui sont en préparation ! Organisés en 4 villages autour de la Parole de Dieu. Village Grandir de tout cœur » Bonne humeur et éclats de rire garantis pour relever en famille des défis. Chacun de nos petits pas permet de grandir, en taille, en sagesse, en amour… Avec sainte Bernadette vous pourrez mesurer que grandir est source de bonheur et de joie à partager. Village Cœur en joie » Dans les pas de Sœur Emmanuelle, exprimez votre joie de vivre ! Venez chanter, jouer, vous déguiser ou encore goûter la joie qui est en vous. Nous vous attendons tous en famille pour unir nos cœurs au cri de joie de Sœur Emmanuelle Yalla !! Village Cœur en paix » Avec Martin Luther King faisons un rêve que la paix soit au cœur de nos vies ! Venez vous détendre au calme, expérimenter un moment de paix, mais aussi écrire sur les murs, construire, rire, chanter, tout chambouler pour que le rêve que nous faisons devienne réalité ! Village Au cœur de la création » Avec saint François, embarquez dans l’arche de Noé venez découvrir la beauté mais aussi la fragilité de notre monde, venez échanger, jouer, créer, vous émerveiller ! En famille, vous trouverez plein de bonnes idées pour vivre en harmonie avec la création ! Défi sportif Relèverez le défi parcourir la plus grande distance possible sur la journée. On ne vous en dit pas plus pour l’instant… sauf qu’un fauve voudra vous barrer le passage ! Autres animations A ces villages viennent s’ajouter des concerts sur la scène centrale, avec Marie-Louise Valentin, Hugues Fantino et Georges Goudet, une tente de la prière, sœur Agathe viendra faire chanter les plus petits 3 séquences de chants gestués, des géants déambuleront dans le village et pour les plus grands des conférences-tables rondes. Voir le programme
Georgeset Claude Pompidou à Cajarc. C’est à l’automne 1962 que Madame Pompidou vint à Cajarc à l’invitation de son amie Madame S. Defforey, sœur de Françoise Sagan. Séduite par la région et sa lumière, elle s’employa à convaincre son mari alors Premier Ministre d’acquérir une propriété située sur le Causse, une ancienne
Biographie de Claude Simon Claude Simon et le Nouveau Roman » Le désastre de la guerre dans la Route des Flandres Petite chronologie de La Route des Flandres L’entremêlement des temps dans la Route des Flandres La sexualité dans le roman La famille dans le roman La géographie du roman Un roman à cheval ? Les dialogues dans la Route des Flandres Les prolongements dans l’œuvre de Claude Simon Textes expliqués Bibliographie de Claude Simon Sur Claude Simon Pour cette étude, nous utiliserons l’édition Minuit double n° 8, 1960 / 1982. Petite chronologie des Reixach Nous ne donnerons ici que quelques repères, afin de faciliter la lecture ; Claude Simon en effet bouscule volontairement la chronologie, et le lecteur peut être un peu perdu. Au XVIIIème siècle, un ancêtre Reixach, noble et conventionnel, se suicide d’une balle dans la tête ; un tableau le représente, une fêlure rouge dans la peinture figurant la blessure fatale. Ce suicide est motivé soit par l’infidélité de son épouse Virginie, soit par la défaite militaire 1808-1813. 1936 De Reixach, hobereau et propriétaire d’une écurie de course, âgé de 38 ans, épouse Corinne, une jeune femme de vingt ans sa cadette. Entre 1936 et 1940, Corinne trompe peut-être son mari avec un jockey, Iglesia. Un après-midi de juin, De Reixach insiste pour monter une pouliche à la place d’Iglésia ; il perd la course et se déconsidère aux yeux de Corinne. Durant la guerre, entre 1939 et 1940, De Reixach est mobilisé ; il fait d’Iglesia son aide de camp ; son cousin Georges, également cavalier, sert dans le même régiment comme simple soldat. Celui-ci évoque son père, un intellectuel obèse et impotent, et sa mère, Sabine, dont la mère était née De Reixach. Pendant l’hiver 1939-1940, Georges et son escadron, comprenant Blum, iglésia et Wack, sont cantonnés dans une ferme des Ardennes ; là, des paysans s’affrontent pour une histoire d’adultère, tandis qu’un cheval agonise ; ils effectuent aussi des étapes de nuit sous une pluie glacée, avant et après ce cantonnement. Durant la débâcle de juin 1940, tout l’escadron auquel appartenait Georges est massacré dans une embuscade ; Georges s’en sort et se retrouve avec Iglesia et De Reixach. Celui-ci meurt un peu plus tard, sur une route, en tirant son sabre dans un dernier geste de bravoure ; Iglesia et Georges sont faits prisonniers. Durant l’automne 1940, Georges, Blum et Iglésia sont emmenés en Allemagne dans un wagon à bestiaux. Une captivité qui dure de l’été à l’hiver 1940-41, avec une tentative d’évasion ratée de Georges ; Dans le camp où ils sont détenus, en compagnie de Blum, un juif – qui ne tarde pas à mourir de maladie – Georges tente de reconstituer l’histoire de De Reixach. Plus tard, après la guerre, il retrouve Corinne qui devient sa maîtresse durant 3 mois ; à la fin de l’été ils passent tous deux une nuit à l’hôtel ; à l’aube, Corinne le quitte. L’entremêlement des temps dans la Route des Flandres Introduction Ainsi que le montre la petite chronologie ci-dessus, plusieurs périodes s’entremêlent constamment dans le roman, au point que l’auteur lui-même a éprouvé le besoin de fixer par un schéma les différentes périodes, en usant d’un code couleur », comme le montre l’image ci-dessous. La première page du plan de montage » de la Route des Flandres. Des moments » différents Le présent » du roman Ce que l’on peut considérer comme le présent du roman, pour lequel d’ailleurs alternent le récit à la 3ème et à la 1ère personne, s’étend sur plusieurs mois Un cantonnement quelque part dans le Nord de la France, non loin de la route des Flandes c’est là qu’intervient le tout premier incident avec la lettre de Sabine à De Reixach ; c’est là aussi qu’aura lieu la dispute entre les paysans, et l’intervention de De Reixach tout ceci se déroule dans le froid et la pluie, durant l’hiver 1939-40. l’embuscade au cours de laquelle l’ensemble du régiment sera tué, sauf quelques survivants, dont Georges nous sommes maintenant en juin 1940. Les trois cavaliers sur la route, et le suicide de Reixach ; cet événement, légèrement postérieur au précédent, date également de la débâcle de juin 1940. Georges et Iglésia sont faits prisonniers. Durant l’automne, Georges et Iglésia sont transférés en Allemagne. Ce long épisode s’étire donc durant environ neuf mois, de l’hiver 1939 à l’automne 1940. On peut rattacher à ce présent » ce qui apparaît comme une prolepse, une projection dans l’avenir ce qui est raconté au présent pourrait n’être qu’un récit, fait cinq ans plus tard donc en 1945, à Corinne. Une première couche de passé Les années précédant immédiatement la guerre constituent une première analepse ; on trouve deux moments essentiels L’histoire de Reixach, Iglésia et Corinne du mariage de Reixach avec la jeune femme, à l’adultère supposé de celle-ci avec le jockey Iglésia, puis la course manquée, tout cet ensemble se déroule entre 1936 et 1939. Plus près du récit présent », les scènes entre Georges et son père, et les allusions à sa mère Sabine, le tout à la veille de son départ au front, à la fin août 1939. Une seconde couche, beaucoup plus ancienne Celle-ci remonte au XVIIIème siècle, et représente une sorte de préparation à l’histoire de Reixach un homme mal marié, trompé par sa femme avec un valet, et qui se suicide pour des motifs plus ou moins énigmatiques. Ce passé est matérialisé par un tableau de famille qui figure sur la couverture du livre. Portrait de l’ancêtre © C. Simon. Un récit non linéaire S’il est relativement facile de repérer ces différents moments de l’histoire des personnages, la difficulté réside dans l’absence totale de linéarité comme le montre l’image du plan de montage », les séquences alternent, se superposent, sans que parfois la jointure » soit visible. Une même scène peut être éclatée entre plusieurs moments du récit ainsi, la rencontre avec le cheval mort, qui revient à plusieurs reprises. De même, on passe presque sans transition d’un récit fait à Blum pendant leur captivité, au même récit fait à Corinne, après la guerre… Exemple Observons par exemple une série de séquences qui se trouve presque à la fin de la première partie, entre la page 92 et la page 105. Page 92 Et ceci sa propre main tenant l’arme trop lourde pour son bras d’enfant » Georges évoque ici le geste qu’il a eu, enfant, lorsqu’il a reproduit le geste suicidaire de l’ancêtre, inspiré qu’il était par les récits de sa mère Sabine. Dans la foulée, il évoque la chambre de ses parents, inchangée ou presque depuis le 18ème siècle, puis il imagine, en un véritable tableau, son ancêtre lisant les œuvres complètes de Rousseau au coin du feu. Le passage s’achève p. 94, par une phrase inachevée qui lui ferait appliquer contre sa tempe la bouche sinistre et glacée de ce… » Page 94 commence une longue parenthèse et alors la voix de Blum disant c’est le commentaire ironique de Blum sur la légende » des Reixach, qui se termine par la réponse évasive de Georges et Georges Bien sûr. Bien sûr. Bien sûr. Mais comment savoir ?… » Si la première partie nous ramenait, en une analepse, à l’enfance de Georges, l’intervention de Blum nous ramène au temps de la captivité. Pages 95-99 Georges revient à ses souvenirs d’enfance, et au récit très circonstancié – presque un ralenti cinématographique – de la scène où le valet enfonce la porte et trouve le corps dénudé de Reixach. Page 99 et je me demandais s’il avait alors lui aussi cet air étonné vaguement offusqué… » l’évocation nous ramène au moment de l’embuscade et de la mort de Wack ; mais insensiblement, au cours de la page 100, on passe de la mort de Wack à celle de Reixach je suppose qu’en ce qui concernait son esprit il devait y avoir déjà longtemps qu’il avait franchi le seuil au-delà duquel plus rien ne pouvait le surprendre ou le décevoir après la perte de ses dernières illusions dans le sauve-qui-peut d’un désastre… » Ici, la désillusion ne peut guère s’appliquer qu’à Reixach, Wack étant considéré comme trop idiot pour avoir des illusions… Dès lors, c’est la silhouette de Reixach avec son sabre qui s’impose p. 100-101, image héroïque détruite par la comparaison grotesque avec les canards sans tête. Brusque passage aux haies qui cassent les ombres en escalier », avant la rencontre avec un groupe de paysans endimanchés qui leur disent de partir cette séquence, postérieure à la mort de Reixach, précède immédiatement le moment où Georges et Iglésia seront faits prisonniers. On est donc revenu en juin 1940. Cette séquence dure jusqu’à la page 105. Enfin, une brusque rupture intervient p. 105 Puis il se rendit compte que ce n’était pas à Blum qu’il était en train d’expliquer tout ça Blum qui était mort depuis plus de trois ans maintenant… » Cette rupture nous ramène en 1945 ; sans doute le récit est-il fait à Corinne… Mais l’ensemble des séquences antérieures, que l’on avait lues comme un récit direct, se révèle être un récit après-coup ! Ainsi, le statut même de chaque récit devient incertain. Le désastre de la guerre dans la Route des Flandres Introduction Longtemps il a paru inconvenant de signaler la présence de l’Histoire dans ce roman le dogme du Nouveau Roman » s’y opposait. Mais l’on est revenu heureusement à une interprétation plus raisonnable de l’œuvre de Claude Simon, qui n’est donc pas une simple combinatoire sans référent, pur jeu formaliste où l’écriture ne parlerait que d’elle-même. Le lecteur repère des moments historiques précis dans le roman La fin du XVIIIème siècle, avec l’influence de Rousseau sur l’aristocratie éclairée l’ancêtre De Reixach lisait toute l’œuvre de Rousseau auprès de sa cheminée, et la désastreuse guerre en Espagne 1808-1814 qui s’acheva par une défaite française ; l’évolution de la bourgeoisie d’argent au XIXème siècle ; La défaite devant l’armée allemande, de l’hiver 1939 à juin 1940. Trois périodes cruciales Durant les deux guerres, en Espagne et en France, les protagonistes, les De Reixach, ont joué le rôle que l’on attendait d’eux l’ancêtre, conventionnel et régicide, mais néanmoins aristocrate, a participé comme cavalier à la guerre Napoléonienne qui visait à exporter la Révolution ; il a donc agi à la fois en Noble en servant dans l’armée et révolutionnaire en luttant aux côtés de Napoléon. Son descendant, le capitaine, s’est lui aussi engagé dans la prestigieuse cavalerie ; sa mort sabre au clair est typiquement un geste de panache aristocratique même s’il est totalement déplacé face aux armes modernes, en l’espèce une mitraillette. Quant à la troisième période, moins importante sans doute, celle qui a vu le triomphe de la bourgeoisie capitaliste, elle a marqué le déclin de l’aristocratie, au profit d’une nouvelle classe dirigeante. Une image désastreuse de la guerre Claude Simon, brigadier durant la seconde guerre mondiale, a vu de ses propres yeux, à la fois les erreurs stratégiques et tactiques qui ont valu à la France une humiliante défaite, et les souffrances qui en ont résulté. Une série d’erreurs et d’incompréhensions durant l’année 1940. Les Français s’attendaient à une attaque semblable à ce qui s’était passé durant la Grande Guerre », à travers la Belgique ils n’avaient pas anticipé une attaque plus à l’Est, du côté de Sedan où se tenait la IIème armée. C’est le fameux plan Dyle », qui aboutit à un désastre. Le rôle décisif des blindés n’avait pas non plus été compris malgré les avertissements d’un certain colonel De Gaulle, dans son Memorandum sur l’avènement de la force mécanique adressé dès le 26 janvier à 80 personnalités on continuait de privilégier l’infanterie, les blindés français étant alors dispersés, et non concentrés comme ceux des Allemands ; L’armement allemand, plus moderne et plus performant, permettait aux armées d’être plus mobiles et de jouer de l’effet de surprise ; Enfin, contrairement à l’armée allemande, les Alliés privilégiaient l’arrêt, par exemple sur la ligne Maginot, sur le mouvement. Dès lors, ce sont les Allemands qui ont la maîtrise du temps attendus vers le 18 mai, l’ennemi arrive dès le 12 mai à la Meuse, à travers les Ardennes. D’où l’emploi absurde d’unités à cheval contre une armée allemande armée de blindés et de mitrailleuses ! La terrible expérience du brigadier Claude Simon. Mobilisé le 27 août 1939, il vit d’abord la drôle de guerre ». Les événements se précipitent en mai 1940 Le 12 mai 1940, il subit sa première attaque à Lez Fontaine, près de la Meuse belge ; son escadron est dispersé, bat en retraite, se regroupe à Sart-Saint-Laurent ; le 14 mai, l’escadron est réduit de moitié. Les 14 et 15 mai, il livre de nouveaux combats et essuie un bombardement d’obus à Tarcienne ; il décroche au milieu de la nuit. 17 mai à l’aube, le régiment tombe dans une embuscade à Cousolre ; Simon rejoint seul Solre-le-Château où il retrouve son colonel Rey, accompagné du colonel Cuny qui a lui aussi perdu son régiment, et d’un cavalier. Il les suit jusqu’à la route d’Avesne où, près du village de Beugnies, Rey est abattu par un sniper. 18 mai Simon est fait prisonnier à la lisière du bois de La Garde de la Villette. Détenu à Avesne, puis à Rance, il rejoint à pied puis en camion Saint Vith, d’où il est transféré en train, dans un wagon à bestiaux, un stalag à Mühlberg sur Elbe. Le 27 octobre 1940, il s’évade et rejoint Perpignan. Tous ces événements sont reproduits dans La Route des Flandres jusqu’à la topographie précise des lieux, comme en témoigne ce dessin de Claude Simon La route des Flandres – © C. Simon. Pour agrandir, cliquez sur l’image. On comprend la colère et l’amertume de Claude Simon, qui s’est senti sacrifié par les États-majors La mort du vieux général qui a littéralement vu disparaître sa troupe et se tire une balle dans la tête, exprime symboliquement toute l’absurdité de la guerre, jamais magnifiée, et toujours décrite comme un désastre. Un mouvement incessant qui n’aboutit qu’à l’embuscade, à la mort ou à la captivité, symbolisé par le bruit incessant des chevaux sur la route, p. 35-36 ou 42-44 par exemple ; un mouvement sans fin et parfaitement inutile tout le trajet d’Iglésia et Georges après la mort de Reixach aboutit à nouveau au cheval mort ils ont tourné en rond p. 114. Je savais parfaitement que c’était impossible qu’il n’y avait pas d’autre issue et qu’à la fin nous serions tous pris », dit Georges alors qu’il est dans le wagon qui l’emmène en Allemagne p. 86. Un esprit chevaleresque » qui ne subsiste plus que sous la forme d’un geste grandiloquent et absurde, que C. Simon décrit comme un mannequin », ou qu’il compare à des canards auxquels on a coupé la tête p. 101 ; L’omniprésence de la boue, de la pluie qui dilue le paysage, du froid et de l’épuisement ; puis, dans le camp, c’est la faim qui devient une torture cf. p. 133. L’obsession de l’agonie et de la mort, notamment par la récurrence du cheval agonisant p. 75, ; finalement, il finit par mourir et on l’enterre p. 304, puis du cheval mort p. 29-32, puis 114-118, 271 ; les hommes aussi meurent sans cesse, le Capitaine, Wack, Blum… Les civils ne sont plus que de vagues silhouettes, les maisons et les villages sont détruits et n’offrent aucun refuge. Et tout repère disparaît Y a plus de front, pauvre con, y a plus rien ! » p. 123 Les hommes ne sont plus que des automates, tenant à peine debout, réduits à des réflexes Georges, dans la ferme où il a pénétré, au début de la seconde partie, pour prendre des vêtements civils, commence par pointer son arme sur le propriétaire qui a fait irruption ; puis il s’assied, incapable de réagir p. 126-128. Et il ne peut que soliloquer ironiquement Dire que ç’aurait été mon premier mort. Dire que le premier coup de fusil que j’aurais tiré dans cette guerre ça a failli être pour descendre ce… » p. 127 ce qui en dit long sur l’impuissance de l’armée française en déroute ! Par la suite, dans le wagon, il se sent métamorphosé en animal p. 112. Et il remarque, à la même page, que sa seule blessure dans cette guerre aura été celle infligée par un coup de poing dans le wagon bondé ! Et tout cela est dépourvu du moindre sens. Une mise à mort ironique de l’héroïsme L’héroïsme guerrier, l’exaltation de la guerre sont des sentiments qui suscitent chez Claude Simon une ironie féroce. Ainsi évoque-t-il le temps de la mobilisation générale, en 1939 … dans une lumière corrodante, des fantômes sanglés et bottés gesticulaient d’une façon saccadée commes s’ils avaient été mus non par leurs cerveaux de soudards brutaux ou idiots mais par quelque inexorable mécanisme qui les forçait à s’agiter, discourir, menacer et parader, frénétiquement portés par un aveuglant bouillonnement d’étendards et de visages qui semblait à la fois les engendrer et les véhiculer, comme si les foules possédaient une sorte de don, d’infaillible instinct qui leur fait distinguer en leur sein et pousser en avant par une espèce d’auto-sélection – ou expulsion, ou plutôt défécation – l’éternel imbécile qui brandira la pancarte et qu’elles suivront dans cette sorte d’extase et de fascination où les plonge, comme les enfants, la vue de
LeCentre Pompidou, célèbre ses 40 ans en proposant notamment jusqu’au 19 novembre 2017, dans les murs du Château de Chambord, une exposition consacrée à celui qui fut à l’origine de sa création, le Président Georges Pompidou. Celui-ci vint à maintes reprises dans un château qui conjuguait son amour de l’architecture et sa pratique de la chasse. Ce n’est
Nous sommes le 31 décembre 1957. Il est 22 heures. Un coursier sonne à la porte de Maurice et Claude Hersaint, alors qu’ils sont sur le départ pour prendre un train de nuit. À cette heure tardive et à leur grande surprise, le coursier leur remet, de la part d’Óscar Domínguez, un petit paquet contenant un dessin encadré[1]. Le dessin représente une femme nue aux gros seins et à tête d’oiseau, avec une fleur à la main et une feuille au bec. Cette sorte de faune de la Saint Sylvestre est dédié en ces termes au collectionneur Maurice Hersaint pour mon très cher Hersa[i]nt avec le souvenir de l’avenir / Domínguez ». Domínguez qui a crayonné ces mots le 31 décembre 1957, quelques heures avant de se donner la mort, n’a fait que constater, au tournant de l’année nouvelle, et avec un certain humour, que l’avenir n’était plus pour lui qu’un souvenir. Rivalisant avec l’humour d’un Jean-François Lacenaire en marche vers la guillotine, le peintre canarien a ainsi renoué avec l’esprit de son ex-ami André Breton dont il avait réalisé jadis la couverture du tirage de tête de l’Anthologie de l’humour noir. Mais si l’expression le souvenir de l’avenir » a pu paraître ironique et terrible à l’homme Domínguez se préparant au suicide, la formule était néanmoins familière au peintre natif de Tenerife, qui ne pouvait pas ne pas se souvenir de deux de ses œuvres majeures de 1938, à savoir, le dessin Le Souvenir de l’avenir publié dans le recueil Trajectoire du rêve, et la toile Souvenir de l’avenir, une des premières manifestations de sa peinture lithochronique. Le dessin et la toile Examinons d’abord le dessin Le Souvenir de l’avenir. Tandis qu’un cygne se profile à l’horizon, on découvre au premier plan une sorte de meuble incurvé et oblong, surmonté d’un phonographe à pavillon et servant de piédestal à une créature mi-femme mi-cygne, dont la robe épouse exactement la forme d’un pavillon de gramophone. Or si nous combinons en pensée d’une part le phonographe à pavillon et d’autre part la créature féminine à la robe évasée d’où émergent d’un côté deux pieds cambrés et de l’autre un bras coudé, on obtient très exactement le fameux objet de Domínguez intitulé Jamais représentant les pieds chaussés de talons aiguilles d’une femme happée par un pavillon de gramophone et dont une main néanmoins ressort par le conduit étroit du pavillon pour remplir la fonction d’un bras de phonographe frôlant les seins et le ventre d’un plateau en rotation. Proposons une lecture sonore du dessin et de l’objet. Commençons par le dessin, où coexistent un phonographe en état de marche et une femme-cygne en position de danseuse. Ne pourrait-on pas dire, vu le cygne au fond du dessin, qu’est mis en scène ici le fabuleux chant du cygne, du doux et merveilleux chant que le cygne ferait entendre avant de mourir ? Le titre du dessin, Le Souvenir de l’avenir, aurait alors un sens prémonitoire. Il annoncerait la mort imminente de la ballerine ou de la femme-cygne. Mais dès que l’on passe à l’objet, il n’y a plus de doute, la mort est à l’œuvre. La femme aux talons aiguilles est bel et bien absorbée par le pavillon du gramophone. Comme elle fait corps avec l’instrument, on peut à nouveau parler de chant du cygne. N’est-ce pas, pour Domínguez, mais aussi pour nous, qu’un phonographe fait entendre, ou fait même vibrer, les accents de la vie, dans les sillons de la mort ? Quant au titre de l’objet, Jamais, il a beau sonner comme un refus de la mort, il finit par désigner ce que précisément il veut dénier, c’est-à-dire l’instance de la mort emportant ou ravissant la frêle et exquise danseuse. En cette même année 1938, où l’objet Jamais est présenté à l’exposition internationale du surréalisme de la galerie des Beaux-Arts et où le dessin Le Souvenir de l’avenir paraît dans le recueil Trajectoire du rêve d’André Breton, Domínguez peint Souvenir de l’avenir, un de ses premiers tableaux lithochroniques. Le dessin et la toile ont beau avoir le même titre, ils n’ont pas le même motif. En effet, nulle trace de personnage da ns la toile Souvenir de l’avenir, hormis une machine à écrire aux touches échevelées, modeste artefact perdu dans un vaste paysage minéral où les plissements géologiques du relief le disputent à d’infranchissables failles. Quand il peint cette toile, Óscar Domínguez commence à prendre conscience de la minéralisation du temps, du concept de peinture ou de sculpture lithochronique qu’il développera bientôt avec Ernesto Sábato. Le titre du tableau, Souvenir de l’avenir, témoigne que le peintre né à La Laguna a la ferme intention de batailler avec le temps. Mais tandis que le dessin Le Souvenir de l’avenir et l’objet Jamais, qui en est l’illustration concrète, magnifiaient l’image onirique du chant du cygne ou de la femme qui disparaît, la toile Souvenir de l’avenir qui met à nu les strates géologiques du relief et pétrifie même un nuage, entend moins figurer le temps par une image fulgurante qu’embrasser sa notion et en indiquer les linéaments. Mais, dans le paysage minéral et désolé du tableau, la petite machine à écrire aux touches déglinguées ne passe pas inaperçue. On découvre en effet, et cela pourrait nous faire remonter jusqu’aux futuristes, que la machine à écrire comme le phonographe sont des capteurs ou des intercesseurs du temps. Il semblerait, par exemple, que la feuille de papier enroulée sur la machine à écrire de Souvenir de l’avenir pourrait comporter quelque message dactylographié et pourquoi pas quelque confession à portée testamentaire. Le souvenir du futur En 1938, il y a un avis de tempête pour Domínguez. La guerre en Espagne le tient plus que jamais éloigné de Tenerife. Il a une grande part de responsabilité dans l’accident qui vaut à Victor Brauner la perte d’un œil. Et, bien entendu, les menaces de déflagration qui pèsent sur l’Europe n’ont aucune raison d’épargner la France. Tout cela contribue à une interrogation ardente sur le passé, le présent et le futur. Mais comment expliquer, plus précisément, que Domínguez ait fait sienne l’expression souvenir de l’avenir » ? En fait, le fameux rêve d’André Breton du 7 février 1937 où le peintre de Tenerife fait surgir de sa toile des lions fellateurs peut nous mettre sur la piste. En effet, quand le peintre de La Laguna anime d’abord sa toile en nouant des arbres, qu’il transforme ensuite en lions fellateurs, pour faire jaillir enfin une aurore boréale, il produit certes du mouvement, mais, mieux encore, il réalise, tel un cinéaste, l’équivalent d’une durée filmique. Pour tout dire, Breton découvre en Domínguez un peintre du temps, et qui plus est, un peintre orgiaque et cosmique. Et comme de surcroît, Breton accorde au rêve, tout au moins sur le plan théorique, une valeur prémonitoire, on peut penser que cela engage Domínguez, en particulier aux yeux de Breton, à devenir un voyant du temps. Mais que Domínguez devienne un guetteur ou un voyant du temps, cela n’a rien d’étonnant, si l’on songe que le surréalisme ne poursuit rien d’autre que le hasard objectif ou la magnétisation des durées. À cet égard, il faut examiner de près le frontispice de l’édition de 1927 de l’Introduction au discours sur le peu de réalité, un frontispice reproduisant une page autographe d’André Breton. Durant l’hiver 1924-1925, l’auteur de l’Introduction au discours sur le peu de réalité avait jeté sur le papier les concepts philosophiques de ce qu’il faut bien appeler le temps sans fil surréaliste. Or, en bas de cette page manuscrite, qui tient à la fois du plan et du brouillon, on voit apparaître l’expression Le souvenir du futur », qui est l’équivalent exact de la formule Le souvenir de l’avenir », que Domínguez utilisera à deux reprises en 1938. L’important n’est pas de savoir si, oui ou non, Breton a soufflé à Domínguez le titre Le Souvenir de l’avenir, mais de constater qu’il y a de la part de Domínguez comme de Breton un véritable attrait pour la notion de temps. Dès lors, il faut se pencher sérieusement sur la partie du frontispice où figure l’expression Le souvenir du futur », une formulation que Breton a d’ailleurs tenu à souligner. Voyons la première phrase de ce qu’il faut désigner comme la quatrième partie du frontispice. Cette phrase est composée d’un énoncé suivi d’une parenthèse Je me souviens la part de ce que l’on m’on accordera que j’invente dans ce dont je me souviens ». On le voit, pour André Breton, la mémoire est sujette à caution. Il y a dans la remémoration du passé une part qui est authentique, véridique ou fidèle, mais il y a aussi une part de pure fabulation dans les souvenirs, comme si l’imagination s’invitait au festin des événements passés ou révolus. C’est donc après avoir noté cette phrase sur le souvenir proprement dit, un souvenir qui est autant une imagination du passé qu’une mémoire du passé, que Breton lui adjoint l’expression audacieuse de souvenir du futur ». Une expression audacieuse, qui résulte d’une simple symétrie dans la pensée de Breton. En effet, de même que l’imagination vient troubler l’évocation du passé, la mémoire à son tour vient hanter les contrées du futur. Dès lors, Breton est à même de distinguer les trois types d’anticipations qui incarnent à merveille le souvenir du futur, à savoir, les promesses, les prophéties et les antécédents. En qui concerne les promesses, Breton affirme qu’elles seront tenues ou non », tout en ajoutant, dans une parenthèse, qu’elles seront forcément tenues ». Dans quelle mesure sommes-nous amenés à tenir nos promesses ? Sous quel angle aborder les promesses ? Faut-il y voir des engagements moraux ou des vecteurs du temps ? Et surtout, que veut dire Breton, quand il écrit que les promesses seront forcément tenues ? À notre sens, Breton suggère que l’enjeu de la promesse n’est pas moral mais temporel. Je ne tiens pas ma promesse par devoir ou par obligation. Je tiens ma promesse parce que ma mémoire anticipatrice fait de la promesse un souvenir déjà inscrit dans le devenir, bref un souvenir du futur. Une vraie promesse n’est pas faite en l’air. C’est le premier exercice d’une création patiente ou continuée. En ce qui concerne les prophéties, Breton note Les prophéties réalisées ou non », suivi de la parenthèse forcément réalisées ». Une fois de plus, qu’est-ce qui incline André Breton à déclarer que les prophéties seront forcément réalisées », alors qu’il sait pertinemment que nombre de prophéties ont été démenties ? À ses yeux, les prophéties se réaliseront nécessairement, non en raison d’une prescience ou d’une excellence dans la prévision mais en vertu d’une voyance ou d’un souvenir de l’avenir. La prophétie est le deuxième cas de figure de l’intuition d’une durée. Enfin, pour ce qui est des antécédents, Breton couche sur le papier cet énoncé purement nietzschéen Les antécédents, ce qui m’annonce et ce que j’annonce. » Le concept de souvenir du futur prend ici son plein essor. De même qu’il y avait des prédécesseurs attendant la venue d’André Breton et comptant sur lui, Breton a lui-même des successeurs et non des disciples, déjà inscrits sur les tablettes du futur. Comment dire ? D’un côté, on songe à Spinoza et à Diderot, car ce qui advient, dans la série des antécédents et des conséquents, c’est la persévération ou la perpétuation fatale d’un désir, et d’un autre côté on pense à Bergson et à Nietzsche, car ce qui survenait hier et retentira demain, c’est l’intuition d’une durée ou la création intempestive d’une flopée d’événements. Il nous faut mentionner maintenant la dernière ligne du frontispice, qui s’inscrit juste après les énoncés relatifs au souvenir du futur. Breton conclut par ces deux formules Négation de la mort. L’insuffisance religieuse. » Remarquons d’abord que Breton, en prônant la négation de la mort, ne fait que se conformer au sixième et dernier secret de l’art magique surréaliste, révélé peu auparavant dans le Manifeste du surréalisme et qui a pour titre Contre la mort ». À elles seules, les expressions Négation de la mort » du frontispice et Contre la mort » du Manifeste du surréalisme, nous font sentir que la pensée surréaliste est une spéculation sur le temps qui n’est pas arrimée à la mort, contrairement à la pensée de Pascal et de Kierkegaard ou celle à venir de Heidegger. Il y a néanmoins une mort qui taraude les surréalistes, c’est le suicide, c’est la mort volontaire. Elle fait d’ailleurs l’objet, exactement à l’époque qui nous occupe, d’une enquête dans La Révolution surréaliste Le suicide est-il une solution ? ». Remarquons ensuite, mais fort brièvement, d’une part, que le sixième secret de l’art magique surréaliste intitulé Contre la mort » sera suivi en 1936 d’un septième secret qu’André Breton consacrera à la décalcomanie sans objet préconçu » inventée par Domínguez, septième secret qu’il intitulera Pour ouvrir à volonté sa fenêtre sur les plus beaux paysages du monde et d’ailleurs », et d’autre part que le Contre la mort » du Manifeste du surréalisme est inséparable du frontispice de l’Introduction au discours sur le peu de réalité. Relisons le début de Contre la mort » Le surréalisme vous introduira dans la mort qui est une société secrète. Il gantera votre main, y ensevelissant l’M profond par lequel commence le mot Mémoire. » Il s’agit ici, non pas d’ignorer la mort mais de la subvertir. L’art magique surréaliste préconise d’enfiler un gant pour se garder de la mort et y enfouir la mémoire. Cette main surréaliste, qui n’est pas une main amie de la mort, c’est la main rouge de L’Énigme de la fatalité, le tableau triangulaire de Giorgio de Chirico acquis par André Breton[2]. Ou bien, dans le Destin du poète, autre toile de Chirico, c’est la main noire surplombant un livre et un œuf. Mieux encore, dans Le Chant de l’amour, c’est le gant en caoutchouc rose, un gant de sage-femme, qui autorise Giorgio de Chirico à célébrer sa propre naissance. En somme, quand un surréaliste prend en main son destin, il coffre sa mémoire et délivre son imagination. Il peut ouvrir ainsi la voie aux souvenirs du futur. Si l’on n’était pas convaincu que Breton invoque la peinture métaphysique de Chirico pour mieux affronter la fatalité et la mort, il suffirait de lire la suite du sixième secret de l’art magique surréaliste Ne manquez pas de prendre d’heureuses dispositions testamentaires je demande pour ma part, à être conduit au cimetière dans une voiture de déménagement. » Que dire d’autre, sinon que Breton songe à la voiture jaune de déménagement que Chirico a peinte dans L’Angoisse du départ ou dans L’Énigme d’une journée ou encore dans Mystère et mélancolie d’une rue. En fait, Giorgio de Chirico, qui était hanté par le séjour et l’effondrement de Nietzsche à Turin, a fait de la peinture un art de divination, un art hallucinatoire requérant tantôt un gant chirurgical tantôt une voiture de déménagement. Citons enfin la seconde disposition testamentaire Que mes amis détruisent jusqu’au dernier exemplaire l’édition du Discours sur le peu de réalité. » Voilà un cas emblématique de souvenir du futur. Alors que Breton publie, en mars 1925 puis en juin 1927, l’Introduction au discours sur le peu de réalité, il n’écrira pourtant pas le Discours sur le peu de réalité, dont il a annoncé la parution[3], mais dont il a aussi prévu l’annihilation de l’édition. Breton a-t-il sabordé l’écriture du Discours sur le peu de réalité pour annuler la disposition testamentaire sur la destruction de l’édition, ou tout au contraire, s’est-il abstenu d’écrire l’ouvrage, procédant ainsi à son effacement et facilitant à coup sûr la disposition testamentaire ? Dans les deux cas, il y a un retentissement dans le futur du projet initial de destruction. C’est cela même un souvenir du futur. Le Discours sur le peu de réalité, comme son titre l’indique, est un livre mort-né que Breton, à sa mort, a emporté dans une voiture de déménagement. Marie-Louise, la suicidée Récapitulons notre parcours. Avant de se suicider, Óscar Domínguez a dessiné une sorte d’autoportrait mi-femme mi-faune. Un dessin dédié à Maurice Hersaint et portant comme mention avec le souvenir de l’avenir ». Or en 1937-1938, Domínguez avait conçu l’objet surréaliste Jamais montrant une femme plongeant dans un pavillon de gramophone et un dessin apparenté intitulé Le Souvenir de l’avenir, à quoi venait s’ajouter la toile Souvenir de l’avenir dont la préoccupation lithochronique était patente. Il nous a alors semblé bon de rappeler que vers 1925 Breton avait analysé le concept de souvenir du futur » dans une page autographe servant de frontispice à l’Introduction au discours sur le peu de réalité. Et nous avons pu évoquer à cette occasion deux dispositions testamentaires d’André Breton. Il nous faut à présent mettre sur le tapis un dessin de Domínguez de 1942, qu’il faut bien appeler La Suicidée[4]. Le dessin est dédié à Gilbert Senecaut, un poète belge qui publie, la même année, sa première plaquette intitulée L’Érection expérimentale[5] Pour Senecaut / Souvenir de / Domínguez / Paris 42 ». Au premier plan et comme prise en plongée par une caméra, se tient en équilibre instable sur le rebord d’un toit de terrasse une femme nue aux seins multiples. L’inscription LA SUICIDÉE » tracée sur le pignon de l’immeuble attenant, ainsi qu’une flèche préfigurant le sens de la chute, ne nous cèle rien sur le sort de cette femme qui ne manquera pas de choir, deux étages plus bas, sur le pavé de la rue. Cette représentation d’une suicidée dans un dessin de Domínguez pourrait paraître fortuite si le peintre canarien n’avait justement mentionné le suicide d’une femme à la fin de La pétrification du temps », dont la publication est contemporaine du dessin. Relisons le dernier paragraphe du texte fondateur de la peinture ou de la sculpture lithochronique Le hasard objectif sera un élément très important dans le choix des éléments à superposer. Les étranges langoustes empaillées, les fossiles, les coquillages, les éléphants bourrés de crins, etc. attendent avec la plus vive angoisse que les mains du poète viennent les livrer à l’espace, cet espace où Marie-Louise a laissé à tout jamais la surface lithochronique authentiquement convulsive de son suicide, le jour où elle se jeta dans le vide du dernier étage de la grande tour[6]. » Il n’y a pas de doute, le dessin La Suicidée semble vouloir illustrer le suicide de Marie-Louise se jetant dans le vide depuis la terrasse d’une maison ou du haut d’une tour[7]. On est tenté de lire ces lignes conclusives, concrètes et abruptes, sur la démarche lithochronique de deux façons. Ou bien le procédé lithochronique exige que le poète, le peintre ou le sculpteur projette un objet, par exemple des langoustes empaillées, dans le vide de la rue, du haut d’une fenêtre jusqu’au bas de l’immeuble, dans cet espace marqué à jamais par le suicide de Marie-Louise[8]. Ou bien, si le terme de Marie-Louise désignait plutôt cette large bordure en carton utilisée par les encadreurs pour un dessin ou une gouache, alors la Marie-Louise serait la surface lithochronique par excellence, cette surface enveloppante où viendraient s’abîmer ou mourir les créatures les plus vivantes comme les objets les plus surannés. En fait, c’est dans le n° 10 de Minotaure, daté Hiver 1937 », que Domínguez a découvert un bois de Posada intitulé Marie-Louise, la suicidée, le graveur mexicain ayant saisi au vol, dans un décor de cathédrale monumentale, la frêle silhouette d’une femme plongeant dans le vide. La gravure de Posada, La Suicida María-Luisa, relate le suicide de Sofía Ahumada, une jeune ouvrière de vingt ans, nerveuse et suicidaire, qui dans la matinée du 31 mai 1899, se précipita dans le vide du haut d’une tour de la cathédrale de Mexico, juste après une courte dispute avec son fiancé Bonifacio Martínez, l’horloger de la cathédrale. Le suicide a suffisamment marqué les esprits pour susciter une complainte populaire Ya Sofía Ahumada murió, Volando de Catedral; ¡Qué momento tan fatal; La infelix se suicidó! L’étonnant est que le prénom de María-Luisa qui légende le bois gravé de Posada semble avoir été emprunté à un autre suicide survenu aussi à Mexico, mais dans la matinée du 4 décembre 1909. María-Luisa Nocker, une jeune fille de quinze ans, après avoir passé une nuit à l’hôtel avec Rodolfo Gaona, un célèbre toréador, se suicida d’une balle de revolver en rentrant à son domicile. Notre propos n’est pas tant de repérer les signes précurseurs du suicide de Domínguez, que de découvrir ce qui se passe entre le peintre qui a conçu l’objet Jamais, les deux versions du Souvenir de l’avenir et le dessin La Suicidée, et le poète André Breton qui a eu recours aux concepts de souvenir du futur » et de hasard objectif. Il existe entre eux une vraie complicité, intellectuelle et affective. Quand le 7 février 1937 Breton rêve de Domínguez en train de peindre, il en fait un démiurge de la peinture animée, à la fois le dessinateur de vues hallucinatoires et l’opérateur de plans ou de durées filmiques. Dans le rêve de Breton, Domínguez, l’inventeur de la décalcomanie sans objet préconçu, se révèle être en possession d’un nouveau procédé automatique enchaînant sur la toile des plans et des événements. Somme toute, serait en germe dès cette date le projet lithochronique, qui irait comme un gant au peintre et à la personnalité d’Óscar Domínguez. Dans la nuit du 27 au 28 août 1938, Óscar Domínguez est à l’origine de la blessure accidentelle qui vaut à Victor Brauner la perte de l’œil gauche. Dans L’œil du peintre », une étude détaillée publiée dans la dernière livraison de Minotaure, Pierre Mabille rapportera cette énucléation à une série de tableaux prémonitoires peints par Victor Brauner. Même si Mabille n’utilise pas explicitement le concept de Breton, les toiles invoquées apparaissent comme autant de souvenirs du futur ». Parmi ces toiles, il faudrait d’ailleurs faire un sort à Paysage méditerranéen de 1932, où un personnage masculin a l’œil percé par une tige surmontée de la lettre D, qui est précisément l’initiale de Domínguez. De surcroît, si l’on voulait établir une parenté entre les tableaux prémonitoires de Brauner et la peinture lithochronique de Domínguez, il suffirait de remarquer que la peintre canarien a choisi d’illustrer son texte La pétrification du temps » avec L’Estocade lithochronique, un tableau où l’épée fichée dans la nuque du taureau se signale par une poignée écarlate épousant la forme de la lettre D, et pour que personne ne s’y trompe, Domínguez a tracé, à la suite de l’initiale D, les autres lettres de son patronyme. Après la guerre, dans une lettre à Victor Brauner, Óscar Domínguez emploiera spontanément la formule grand souvenir de l’avenir » pour qualifier l’œuvre et les tableaux prémonitoires d’un peintre dont il avait été lui-même l’instrument d’une énucléation fatale Ma visite à ton atelier, grand souvenir de l’avenir, et surtout grand soulagement, car on n’est pas tout seul dans le monde[9]. » Revenons à la dernière livraison de Minotaure. André Breton y présente Souvenir du Mexique », accompagné de magnifiques photos d’Alvarez Bravo. Une photo cadrant un atelier de cercueils pour enfants est ainsi commentée par Breton Le rapport de la lumière à l’ombre, de la pile de boîtes à l’échelle et à la grille et l’image poétiquement éclatante obtenue par l’introduction du pavillon de phonographe dans le cercueil inférieur sont supérieurement évocateurs de l’atmosphère sensible dans laquelle baigne tout le pays. » Décidément, le pavillon de gramophone peut convoquer la mort. Au Mexique, le photographe Alvarez Bravo dispose un pavillon dans un cercueil d’enfant. Tandis qu’à Paris, le peintre Domínguez fait entendre, aussi bien dans l’objet Jamais que dans le dessin Le Souvenir de l’avenir, le chant du cygne d’une femme plongeant dans un pavillon de phonographe. La bifurcation de Marseille Né le 8 décembre 1902 à Sagua la Grande, Wifredo Lam, qui est aussi prénommé Oscar de la Concepcion, passe son enfance et sa jeunesse à Cuba. Il vivra quinze ans de sa vie d’adulte surtout à Madrid puis quittera l’Espagne au printemps 1938 pour rejoindre Paris. Ce sera la rencontre coup de foudre » avec Picasso qui reconnaîtra et intronisera Wifredo Lam comme peintre. Outre sa connivence avec Picasso, Lam se sentira vite à l’aise parmi les surréalistes. Il y a incontestablement un parallèle à faire entre Wifredo Lam et Óscar Domínguez, qui, né à La Laguna le 7 janvier 1906, quittera aussi son île lointaine, et résidera, à partir de 1929, beaucoup plus à Paris qu’aux Canaries. Entré dans le groupe surréaliste en septembre 1934, l’inventeur de la décalcomanie du désir aura des relations privilégiées avec André Breton. Justement, c’est à Marseille, durant l’hiver 1940-1941, qu’on mesure le mieux à quel point le surréaliste canarien est proche de Breton et à quel point le peintre cubain se sent devenir surréaliste. Au printemps 1940, Domínguez est chargé de la couverture du tirage de tête de l’Anthologie de l’humour noir. Au début de 1941, il revient à Wifredo Lam d’illustrer le poème Fata Morgana. Le plus surprenant est que Lam se saisit de l’occasion pour dessiner d’une toute nouvelle manière, véritable point de départ de son imaginaire et de son art surréaliste. De plus, Domínguez et Lam participent à la refondation du jeu de cartes, rebaptisé par les surréalistes jeu de Marseille. Le sort a voulu que les peintres natifs de l’île de Tenerife et de l’île de Cuba aient eu à dessiner les quatre étoiles noires du Rêve l’As et le Mage Freud pour Domínguez, le Génie Lautréamont et la Sirène Alice pour Lam. Et l’étonnant, là encore, est que cette expérience est décisive pour Lam. Car on pressent, dans la carte Lautréamont, la jungle foisonnante, et dans la carte Alice, la femme-cheval en transe, deux des visions typiques de la peinture à venir de Lam. Au fond, sachant qu’à Marseille, en 1941, les deux exilés Domínguez et Lam sont au cœur du groupe surréaliste, il faut nous interroger sur leur destin respectif. Pourquoi le premier sort-il du circuit surréaliste à la Libération et doute-t-il plus que jamais de lui-même pendant les années cinquante ? Pourquoi, au contraire, le second reste-t-il lié au groupe et continue-t-il à croire en sa bonne étoile ? Le retour pour Lam au pays natal, sur une terre épargnée par la guerre mondiale n’explique pas à lui seul l’extraordinaire fécondité de la peinture de Lam en 1942 et 1943. En ce qui concerne Domínguez, rien ne l’empêchait, en s’éloignant de Breton, de creuser son propre sillon et de continuer à affirmer sa singularité. On pourrait aborder le problème sous un autre angle. Dans un premier temps, Picasso a été pour Lam un modèle indépassable. Ensuite, Picasso a adoubé son neveu », l’élevant à l’ordre de la peinture. Mais à partir de 1941, Lam s’est engagé dans le giron surréaliste tout en inventant une peinture surnaturaliste des corps démembrés et en transe. Ce qui ne l’empêchera pas de conserver de bonnes relations avec Picasso. En revanche, entre Domínguez et Breton, les choses se passent un peu différemment. D’abord, Domínguez, qui vit à Paris, met quelques années avant de faire son entrée dans le groupe surréaliste. Ensuite de 1934 à 1941, les relations entre Domínguez et Breton sont au beau fixe, avec comme moments forts 1. le voyage aux Canaries ; 2. la découverte d’une décalcomanie équivalant à la recherche du Point Sublime ; 3. le rôle dévolu à Domínguez, dans le rêve du 7 février 1937, de cameraman d’une peinture animée ; 4. la volonté du peintre canarien d’explorer le temps, aussi bien dans l’objet Jamais que dans sa théorie et sa pratique lithochronique. 5. enfin le jeu de Marseille qui témoigne du collagisme surréaliste. Pourtant, en dépit de cette période faste, quelque chose de désaccordé, après Marseille, se produira entre Domínguez et Breton. Cela sera visible au retour de Breton à Paris. En effet, le 30 mai 1946, Domínguez s’inquiétera, Breton ne lui ayant pas fait signe. Il chargera alors Maud Bonneaud, son épouse depuis un an, de lui écrire pour une reprise de contact Mon cher André / Oscar m’a dit “ Toi que tu es dans la littérature ”, écris à André que nous attendons toujours son coup de téléphone. / Nous sommes en effet extrêmement impatients de vous revoir. Nous pensons que c’est important. Tant de bruits circulent, tant d’histoires ont été inventées, qu’Oscar tiendrait beaucoup à tirer cela au clair avec vous[10]. » Dans cette lettre, où Maud et Óscar expriment leur très grande affection » à Breton et manifestent qu’ils seraient tellement heureux » de le revoir, on perçoit une certaine gêne, pour ne pas dire une vive alarme. Quels pouvaient bien être les bruits et rumeurs autour d’Óscar Domínguez ? Il est difficile de le savoir. En revanche, ce qui pouvait avoir plus qu’irrité André Breton, c’est que Paul Éluard, en décembre 1943, et Georges Hugnet, en janvier 1945, avaient préfacé le catalogue d’une exposition Domínguez. Il paraissait alors peu pensable que le peintre canarien puisse être du côté de Breton tout en fréquentant ouvertement Paul Éluard et Georges Hugnet, devenus des adversaires du surréalisme. Il est curieux aussi de constater une sorte de chassé-croisé entre Lam et Domínguez, au début des années quarante. Quand le premier s’émancipe de Picasso, le second semble vouloir l’élire comme modèle. Ce chassé-croisé n’empêche pas une certaine rencontre entre les deux peintres insulaires. Par exemple, il y a une prolifération de seins dans plusieurs dessins de Lam destinés à Fata Morgana comme dans le frontispice d’Au fil du vent et La Suicidée de Domínguez. Ou encore, il y a une même figuration voluptueuse de femme renversée dans une gouache de Lam de 1942 et dans La Rêveuse, une toile de Domínguez de 1943. Bien entendu, les deux peintures ne sont pas superposables. Mais il reste que quand le cubain affirmera et cultivera sa singularité, le canarien aiguisera moins son génie et tâtonnera davantage. L’émulation surréaliste manquera à Domínguez. En 1947, il ne pourra pas, dans le cadre de l’exposition internationale du surréalisme, honorer Lautréamont et élever un autel à la Chevelure de Falmer, comme le fera Lam. Il y a un indice qui ne trompe pas. À Marseille, durant l’hiver 1940-1941, les surréalistes semblent sous le charme d’Hélène Holzer, la compagne de Wifredo Lam. Le jour de son anniversaire, le 19 janvier 1941, un petit carnet recueillera les hommages, entre autres, de Victor Brauner, Jacques Hérold et Óscar Domínguez mais aussi du couple Breton et de la petite Aube. André Breton, pour sa part, dédie à sa très gracieuse amie Hélène Lam » un poème où elle incarne à la fois l’avenir et la durée[11]. Quant à Domínguez, outre une composition graphique, il écrit à Helena » une dédicace, où, en une formule équivalant à un souvenir de l’avenir, il évoque une durée alchimique et millénaire, miroir et promesse de son affection El agua vieja de mil años que es mercurio sobre el cristal es al mismo tiempo, el espejo donde se reflejará mi afecto profundo por ti / Domínguez ». Si Hélène, pour Domínguez, comme pour Breton, représente l’image même de la permanence et de la grâce, il faut bien croire que sa présence constante auprès de Wifredo Lam à Marseille, puis à Cuba, aura des effets plus que vivifiants dans sa peinture supernaturaliste et inventive. Sans forcer la comparaison avec Wifredo Lam, on peut s’interroger sur la vie passionnelle de Domínguez. Sous l’Occupation, quelles sont ses relations avec Roma, la pianiste juive, qui a fait le voyage aux Canaries et dont il a réalisé un portrait ? Avec Marcelle Ferry, l’ancienne amie de Breton, dont il a été l’amant ? Avec Laurence Iché, dont il illustre Au fil du vent ? Et surtout, avec Maud Bonneaud, cette étudiante qui a côtoyé André Breton ? Nous avons déjà mentionné cette note sombre que semble refléter le dessin La Suicidée. Mais, à lire l’envoi, signé André Thirion, sur un exemplaire du Grand Ordinaire, édité en 1943 avec le renfort d’illustrations et d’eaux-fortes licencieuses de Domínguez, ce dernier aurait eu une telle appétence pour certaines douces colombes, que cela contrebalancerait chez lui toute propension au suicide Pour Óscar Domínguez, le Minotaure en frac, il apprivoise les colombes et après les avoir lâchées il les sacrifie à coups de revolver hexagonal ; il en broie les plumes, les yeux et les pattes dans un gros mortier avec son gros sexe, et il s’en repaît entre 10 h 35 et 11 h 45 du matin, avant l’heure du cinzano sans gin. En plus, nous préférons les illustrations au texte qui n’aurait jamais été publié sans ton obstination d’ivrogne ! Un soir que tu t’en prenais à une pauvre colombe turque, Oscar, cher canaque. / Ton ami, Thirion ». D’ailleurs, ces petites colombes ou ces cailles qui lui tomberaient rôties dans la bouche, on en trouve très précisément la trace dans Œil-de-père », un poème de Robert Rius sur l’imagination, daté du 25 mai 1943 l’imagination cheval / celle qui / celle que l’on rôtit / celle que Dominguez appelle petite colombe blanche »[12]. Bref, à cette époque, Domínguez était-il heureux ou même chanceux en amour ? Rien ne le dément, rien ne l’établit. Une machine à écrire et à peindre Après la guerre, il est de fait que Domínguez, en exil plus que jamais à Paris, et qui se tient aux côtés d’Éluard et de Picasso, a dit adieu à Breton. Or, de même que nous avons suggéré que le dessin d’avant le suicide, portant la mention avec le souvenir de l’avenir », replongeait Domínguez dans une temporalité qui le rattachait à Breton, de même nous voudrions montrer qu’un phénomène analogue se produit chez Breton dans le dernier texte qu’il écrit sur la peinture et qui clôt d’ailleurs l’édition définitive du Surréalisme et la peinture. Le 7 février 1965, qui est tout de même le jour anniversaire du fameux rêve sur Domínguez, Breton signe une préface pour le catalogue de l’exposition Konrad Klapheck à la galerie Ileana Sonnabend. Dans une facture à la lisière de l’hyperréalisme, les tableaux de Klapheck déclinent toute une gamme de machines, tels que machines à écrire, machines à coudre[13], téléphones et sirènes, robinets et douches, embauchoirs, timbres de bicyclettes, toute une gamme qui, à l’exception près des siphons des tables de café ou des pavillons de phonographe, ressortit de la machinerie ou de la quincaillerie déjà peintes par Domínguez. Pour exposer le problème de la machine, Breton fait flèche de tout bois. Frottant le Surmâle d’Alfred Jarry à La Science de l’amour de Charles Cros et à L’Ève future de Villiers, puis invoquant Freud et Havelock Ellis, il aboutit à la machine à coudre de Lautréamont. Autre perspective machinique, celle qui culmine dans La Mariée mise à nu par ses célibataires, même de Duchamp, en prenant appui sur les dessins mécaniques de Picabia ou de Dada. Surgit enfin, éblouissante et aguicheuse dans son rôle de vamp », la machine à écrire, qu’André Breton présente ainsi Il n’y a pas si loin de la “pieuvre-machine à écrire” pour Jacques Vaché en 1917 à celle dont les touches “germent” dans telle toile de 1939 de Domínguez ; ici et là manifestement on garde trace de leur corps à corps avec leurs premières animatrices “les belles sténodactylographes” chantées par Apollinaire. » Alors que pour Klapheck[14], la machine à écrire, représentant le père, la politique et l’artiste, est de sexe mâle, pour Breton, au contraire, elle serait une vamp et elle conserverait la trace du corps à corps avec les belles sténodactylographes », celles dont Guillaume Apollinaire, subjugué par l’affairement, les signaux sonores, les inscriptions, d’une rue industrielle de Paris, avait remarqué la présence, dans le poème Zone » Les directeurs les ouvriers et les belles sténodactylographes Du lundi matin au samedi soir quatre fois par jour y passent Quant à Jacques Vaché, il avait fait surgir, dans sa lettre à André Breton du 18 août 1917, l’image d’un dandy à monocle pourvu d’une pieuvre-machine à écrire ». Et pour ce qui est enfin de la référence de Breton à Domínguez, sont concernées en fait deux toiles de 1938, ou bien La Machine à écrire, qui a pour motif une mécanique en décomposition, mi-végétale mi-animale, hérissée de touches déglinguées comme autant de tentacules, ou bien Souvenir de l’avenir, dont nous avons déjà parlé, avec sa machine à écrire un petit peu moins délabrée. Pourquoi donc le 7 février 1965, Breton convoque-t-il la pieuvre-machine à écrire » de Vaché, la machine à écrire aux touches germinatives de Domínguez et enfin les belles sténodactylographes » d’Apollinaire ? Pour se faire une idée de cette vamp aux touches germinatives, il faut se situer en février 1928, en pleine séance de Recherches sur la sexualité. Voici les propos d’André Breton, indiquant à quel âge il eut sa première expérience sexuelle et quel en fut le déroulement 19 ans. Avec une jeune dactylographe de chez Underwood, qui habitait Aubervilliers moi, Pantin. J’ai fait l’amour avec elle dans un hôtel de la rue de la Harpe. Je n’ai pas cessé toute la nuit d’être très tourmenté au sujet de mes possibilités physiques, bien que j’aie fait l’amour avec elle quatre fois. Impression merveilleuse néanmoins, mais le lendemain à 8 heures, crise d’appendicite violente nécessitant mon transport à l’hôpital ?[15]. » Que révèle cette confidence ? Elle nous apprend au moins trois choses 1. André Breton a eu sa première relation sexuelle, son premier corps à corps, avec une jeune dactylographe de chez Underwood, qui rappelons-le était une marque de machine à écrire. C’est donc sous le double signe de la machine écrire que Breton a éprouvé en 1915 ses premiers émois physiques ; 2. Il y a une étrange coïncidence entre le poème d’Apollinaire où les belles sténodactylographes » passent dans la rue quatre fois par jour » et le souvenir, rapporté par Breton, d’avoir fait, avec la jeune dactylographe, quatre fois » l’amour durant la nuit ; 3. Sachant que le corps à corps avec la dactylographe a été merveilleux mais a tout de même déclenché une crise d’appendicite, on comprend que Breton à propos des machines de Klapheck, ait fait appel aux machines à écrire de Vaché et de Domínguez. Car, dans la pieuvre-machine à écrire » de Jacques Vaché, on verrait assez bien le corps tentateur et peut-être insatiable de la jeune dactylographe, et dans la machine déglinguée aux touches germinatives de Domínguez on distinguerait, outre les semences répandues par le jeune poète, les chocs et les ébranlements mettant à rude épreuve jusqu’à la carcasse de sa machine désirante. André Breton, à travers le trio Apollinaire, Vaché et Domínguez, aurait donc eu une réminiscence de ses premières étreintes avec la pieuvre dactylographe. Óscar Domínguez, avant le suicide, aurait eu, pour sa part, la réminiscence d’une machine à écrire germinative et d’un phonographe avaleur de femme. Au peintre comme au poète, la machine à écrire et le phonographe auront donc dévoilé un éros teinté de terreur. Le peintre canarien était-il suicidaire ? Marcel Jean rapporte qu’un jour, Roma l’ayant quitté sans rien dire, il avait tenté de se pendre, mais sans succès, le clou auquel il avait accroché la corde ayant cédé[16] . La journaliste Mercedes Guillén, qui avait rendu visite à Domínguez, fin 1957, a raconté par la suite que le peintre lui avait laissé entendre qu’il allait se suicider. Il lui aurait aussi confié, qu’étant enfant, il avait eu envie de mourir, à la vue de sa petite cousine dans un cercueil de verre, sur le chemin du cimetière[17]. Force est de convenir que le suicide de Domínguez, dans la nuit du 31 décembre 1957, date ô combien symbolique, était prémédité. Nous avons insisté sur le dessin annonciateur de suicide qu’un coursier a remis à Maurice Hersaint le 31 décembre à 22 heures. Il est temps de révéler deux ultimes documents établissant, pour l’un, une volonté d’en finir avec la vie, et pour l’autre, un désir de suspendre cette décision à l’entrevue avec une femme, en l’occurrence avec Marcelle ou Lila Ferry, qui fut de 1936 à 1937 l’amante d’Óscar Domínguez, après avoir été d’ailleurs la compagne de Georges Hugnet, puis d’André Breton. Sur un formulaire de télégramme, où ont été apposés, sans doute à l’aide d’un tampon, deux labyrinthes, on peut lire, écrit en gros caractères, de la main de Domínguez Bonne Année 1958 », suivi de sa signature. De plus, en marge du formulaire, est noté de la main de Marcelle Ferry Óscar m’avait adressé ce télégramme que je reçus après sa mort le 31 décembre 1957 / J’ai un remords[18] ». La signification du labyrinthe ne fait pas de doute. Il s’agit du labyrinthe dans lequel était enfermé Óscar Domínguez, alias le Minotaure[19], à l’image d’ailleurs d’un tableau de 1950 intitulé Minotauro. Cependant, ces vœux de Bonne Année 1958 », dont la teneur est plus qu’ambiguë, doivent être appréciés à la lumière d’un billet rédigé par Domínguez, à deux pas du domicile de Lila Ferry, très probablement le samedi 28 décembre 1957. Ce billet commence ainsi Dans le bistro du coin à 10 mètres de chez toi ». Puis vient l’objet du message – une demande pressante de rendez-vous Lila-c’est-la-vie. Voilà comme je t’appelais hier soir dans mes rêves… Je voudrais te parler et te voir. Je serai à la Rhumerie martiniquaise à 6 h. ce soir samedi. J’étais très malade, mais le Minotaure a vaincu tout, et je vous attends, avec toute l’amitié et l’intérêt de toujours. C’est-la-vie = Lila. Viens toujours / Óscar » Que s’en est-il suivi[20] ? Soit Lila Ferry a répondu à l’appel du Minotaure et n’a pas su apaiser ses angoisses, soit elle n’a pas voulu ou n’a pas pu aller au rendez-vous. Dans les deux cas, les vœux de bonne année du Minotaure auront un goût amer pour Marcelle Ferry, qui reconnaîtra avoir eu du remords. Le 17 avril 1936, dans une période de passion violente et intense, Domínguez écrivait à Lila Ferry c’est toi qui me donne la force et l’envie de vivre. » Une semaine après, il évoquait le souvenir impérissable d’un amour d’enfance, celui de sa petite cousine morte à sept ans. Et il précisait que son amour pour Lila s’était substitué à celui de la petite fille C’est toi qui prends la place. » Ce qui voudrait dire que Lila Ferry, en 1936, condensait deux Lila Lila-la-cousine-morte et Lila-c’est-la-vie. Le 28 décembre 1957, Domínguez lance un appel au secours à Lila Ferry. Il espère rencontrer Lila-c’est-la-vie. Le 31 décembre, le Minotaure s’enferme dans son labyrinthe et confectionne deux souvenirs du futur, un dessin pour Maurice Hersaint et un télégramme de Bonne année 1958 pour Lila Ferry. Georges Sebbag Notes [1] Ces faits nous sont connus grâce au témoignage de Claude Hersaint, qui aujourd’hui encore en est tout émue. Ils m’ont été aimablement rapportés par Véronique Serrano du musée Cantini de Marseille, à qui j’avais demandé de joindre Madame Hersaint pour en préciser le détail. [2] Curieusement, La Révolution surréaliste n° 7 du 15 juin 1926 reproduira L’Énigme de la fatalité sous le titre L’Angoissant voyage. [3] En 1924, le Discours sur le peu de réalité est signalé en préparation » dans Les Pas perdus puis dans le Manifeste du surréalisme. En juin 1927, il est indiqué à paraître » dans l’Introduction au discours sur le peu de réalité. [4] À notre connaissance, le dessin La Suicidée d’Óscar Domínguez a été reproduit pour la première fois en 1978 dans Le Cache-sexe des anges, Les Lèvres nues, Bruxelles. [5] Gilbert Senecaut, L’Érection expérimentale, intr. Roger Vitrac, éd. L’Aiguille aimantée, Anvers, 1942. Selon l’auteur l’érection expérimentale » définirait une nouvelle méthode pour l’insémination de la réalité ». En fait, G. Senecaut, mêlant allégrement psychologie et biologie, se livre à une parodie de la terminologie et de l’expérimentation scientifique. [6] Óscar Domínguez, La pétrification du temps », dans La Conquête du monde par l’image, les éditions de la Main à plume, Paris, 1942. Notons que ce texte, portant la seule signature de Domínguez a été écrit en collaboration avec Ernesto Sábato, comme l’a indiqué André Breton, en mai 1939, quand il en a fait une longue citation dans son article Des tendances les plus récentes de la peinture surréaliste » publié dans Minotaure n° 12-13. Cette longue citation couvrait en fait la seconde partie de La pétrification du temps », mais à cette différence près que la citation de Breton s’achevait sur la phrase Le hasard objectif sera un élément très important dans le choix des éléments à superposer », tandis qu’en 1942 cette phrase se poursuit avec le passage mentionnant les langoustes empaillées » et le suicide de Marie-Louise. D’où cette interrogation cet ultime passage, où apparaît le thème de la suicidée, figurait-il dans le manuscrit de 1939 consulté par Breton ou correspond-il à un ajout que Domínguez aurait introduit en 1942 ? [7] Il nous faut signaler le tableau de 1939 de Frida Kahlo intitulé Le Suicide de Dorothy Hale, illustrant de façon dramatique le saut dans le vide de la jeune femme du haut d’un building de New York, le 21 octobre 1938. Domínguez a pu avoir connaissance de ce suicide qui avait touché de près Frida Kahlo. [8] La thèse, selon laquelle Domínguez est hanté en 1942 par le suicide d’une femme pourrait trouver un renfort dans le frontispice d’Au fil du vent de Laurence Iché. Cette plaquette comprend huit illustrations de Domínguez, à savoir, la vignette de couverture un œil ouvert, un œil fermé, le frontispice, et six vignettes courant dans le texte. Or le frontispice d’Au fil du vent, comme dans La Suicidée, représente une femme nue aux multiples seins. Surtout, comme cette femme nue ne semble avoir pour tête que le poignard qu’elle brandit, elle serait bien au bord du suicide. D’autre part, il est curieux de noter que ce quasi début d’Au fil du vent dans ta poitrine de phosphore / qui s’ouvre en un vent d’éventail / Le vent ce grand sculpteur d’érections uniques / dans le jeu de quilles des jours trébuchés », semble trouver un écho dans cette quasi fin de L’Érection expérimentale Mais il jouait aux quilles avec des seins / Mais les saints sont des hommes / Mais il fécondait une morgue ». [9] Voir Victor Brauner, Écrits et correspondances, 1938-1948, éd. établie par Camille Morando et Sylvie Patry, Centre Pompidou, INHA, Paris, 2005, p. 184. Dans cette lettre non datée et accompagnée d’un dessin, on apprend que Domínguez fournit un peu de feuille d’or à Brauner. On a le sentiment, comme l’atteste la formule grand souvenir de l’avenir », que les deux peintres partagent alors la même recherche bretonienne de l’or du temps. Il serait intéressant de pouvoir dater avec certitude cette lettre importante. [10] Voir [11] En voici quelques vers Dans la prochaine feuille du printemps / Il y aura deux ailes pour Hélène […] Mais l’avenir est une chambre dans laquelle vous mettez l’ordre des perles […] [une branche de corail qui] ne peut se diviser ni pâlir avec les années ». Voir Helena Benitez, Wifredo and Helena, My life with Wifredo Lam, 1939-1950, Acatos, Lausanne, 1999. [12] Je remercie Rose-Hélène Iché de m’avoir signalé le poème Œil-de-père » de Robert Rius. [13] Rappelons que fut organisée à Berlin, au cours de la Grande Soirée Dada du 15 mai 1919, une course entre une couturière sur sa machine à coudre et une dactylographe sur sa machine à écrire. [14] Voir dans le catalogue de l’exposition Konrad Klapheck Galerie Ileana Sonnabend, Paris, 1965, outre la préface d’André Breton, le texte de K. Klapheck intitulé La machine et moi ». [15] Archives du surréalisme, Recherches sur la sexualité, Janvier 1928 – août 1932, éd. José Pierre, Gallimard, Paris, 1990, p. 116-117. [16] Voir Marcel Jean, Au galop dans le vent, éd. Jean-Pierre de Monza, Paris, 1991, p. 46-47. Cette tentative de suicide pourrait se situer en 1935. [17] Voir Mercedes Guillén, Artistas españoles de la Escuala de París, Madrid, Taurus, 1960. Le passage sur Domínguez est repris dans le catalogue Óscar Domínguez, 1926-1957, CAAM, Canaries, à la rubrique Chronologie, établie par Emmanuel Guigon, p. 307-308. [18] Ce document figure dans la correspondance d’Óscar Domínguez à Marcelle Ferry, que mon ami Dominique Rabourdin m’a permis de consulter. [19] Ce surnom de Minotaure remonte au moins au début des années quarante, comme le signale la dédicace d’André Thirion, déjà citée, sur un exemplaire du Grand Ordinaire Pour Óscar Domínguez, le Minotaure en frac […] ». [20] Une seule chose est certaine. Domínguez a porté lui-même le message au domicile de Lila Ferry. En effet, on peut lire sur l’enveloppe contenant le billet Mme Lila Ferry / rue Bonaparte / E. V. » Références Le souvenir de l’avenir », in Surrealismo Siglo 21, actes du colloque de l’université de La Laguna, sous la direction de Domingo-Luis Hernández, Santa Cruz de Tenerife, 2006. Traduit en espagnol dans la revue La Página Santa Cruz de Tenerife, n° 64-65, 2006.
En2022, vous pouvez retrouver : - du 8 au 15 juillet : Claudine VALETTE & Odile TEULIERE, estampes et calligraphie, - du 15 au 24 juillet : Irène QUESNAY, peintures, - du 26 juillet au 5 août : Anne FRETEY, peintures, - du 5 au 12 août : Marie-Claude VERY, peintures, - du 12 au 19 août : Barbara DUBIENKO & André STENGELE, gravures (démonstrations), - du 19 au 26 août : Marc
Au début des années trente, au Quartier latin, une rencontre inattendue réunit Georges Pompidou et Claude Cahour. Ils se marient quelques années plus... Lire la suite 19,90 € Neuf Poche Expédié sous 3 à 6 jours 9,00 € Ebook Téléchargement immédiat 9,99 € Grand format Expédié sous 3 à 6 jours 19,90 € Expédié sous 3 à 6 jours Livré chez vous entre le 25 août et le 30 août Au début des années trente, au Quartier latin, une rencontre inattendue réunit Georges Pompidou et Claude Cahour. Ils se marient quelques années plus tard et forment un couple uni partageant le goût de la littérature, de la musique, du cinéma. Très vite, ils fréquentent les galeries d'art et les artistes contemporains. Dès 1948, les Pompidou – comme on les appelle avec affection – font l'acquisition de leur première toile abstraite signée d'un peintre alors peu connu Youla Chapoval. Par la suite, au fil des rencontres, leur collection se construit en relation étroite avec les créateurs. En 1958, Claude offre à son mari un Nicolas de Staël. En 1962, l'accrochage d'un Soulages dans le bureau du Premier ministre surprend. Quand, en 1969, à l'Elysée, le Président et son épouse font appel à Pierre Paulin et à Yaacov Agam pour la rénovation et la décoration de leurs appartements privés, force est de constater que l'art représente pour eux une raison de vivre. Que la création du Centre Pompidou viendra couronner. C'est cette fusion artistique, ce sens inné des oeuvres capables d'entrer dans l'Histoire, leurs rapports avec les artistes qu'Alain Pompidou et César Armand dévoilent dans cet ouvrage biographique et intime, riche de souvenirs, de témoignages et d'illustrations. A travers le récit de leur fils, les souvenirs de l'épouse de Jean Coural, directeur du Mobilier national, de Maïa Paulin, Pierre Soulages, Jack Lang et bien d'autres, ce livre révèle le parcours initiatique autant qu'affectif d'un couple pas comme les autres, mu par une insatiable curiosité. Date de parution 09/11/2017 Editeur ISBN 978-2-259-25982-8 EAN 9782259259828 Format Grand Format Présentation Broché Nb. de pages 272 pages Poids Kg Dimensions 14,2 cm × 22,6 cm × 2,3 cm Biographie d'Alain Pompidou Alain Pompidou, fils de Claude et Georges Pompidou, passionné et collectionneur d'art, est professeur émérite de biologie médicale – il réalise ses propres brevets dans le champ du diagnostic. Après la publication de la correspondance de son père et d'un livre sur sa mère, il consacre son temps aux archives familiales. César Armand est un jeune journaliste économique et politique, également amateur d'art.
pourla littérature et les arts, pour les formes contemporaines avec sa femme Claude Pompidou. _ les appartements de l’Élysée : l’action publique du président Georges Pompidou En quoi ces exemples de commande présidentielle sont-ils modernes et innovants ? Dans l’aile Est du palais, au premier étage, le président de la République
Recensé Maurice Grimaud, Je ne suis pas né en mai 68. Souvenirs et carnets 1934-1992, Paris, Tallandier, 2007, 25€. Quarante ans après les événements de mai 1968, la température éditoriale a pris le relais de la fièvre sociale et estudiantine. L’amateur éclairé se perdra entre ceux qui jugent le joli mois de mai » à partir de ses fruits hexagonaux et contemporains [1], les éditions de sources commentées [2], les travaux d’historiens qui insistent sur la spécificité française [3] ou ceux qui invitent au contraire à une vaste remise en perspective internationale. Les revues sacrifient elles aussi à cet événement-totem [4], qui suscite une moisson de colloques scientifiques et de journées d’études. La discrétion qui entoure les cinquante ans de mai 1958 n’en semble que plus significative. Aux yeux du citoyen contemporain, le fait politique » qui conduit au changement de constitution le cède en importance au fait culturel » dont mai 1968 ne représente que la face émergée, le signe qui rend intelligible un changement des valeurs et des représentations. Acteur du mai 1968 parisien, le préfet de police Maurice Grimaud avait déjà livré sa version de la crise dans un livre publié en 1977 [5]. Son nouvel ouvrage se présente sous un titre plein d’ironie. Le préfet des barricades », qui fit preuve de sang-froid au plus fort de la crise, entend y donner plus de profondeur historique à son personnage de grand serviteur de l’État, en publiant un récit, des carnets ou des lettres. Il est permis de regretter que les pages consacrées à l’affaire Ben Barka ne soient pas accompagnées d’un appareil critique qui permettrait au lecteur de situer un scandale dont les éléments nous sont devenus hélas ! étrangers. L’aspect hétéroclite de Je ne suis pas né en mai 68 pourra en outre dérouter. On y glisse des années de l’Entre-deux-guerres au journal tenu pendant le premier intérim d’Alain Poher à l’Élysée, au printemps 1969. Le quotidien d’un voyage présidentiel dans la Picardie des années 1960 voisine avec la fébrilité des émeutes de mai 1968 pas plus que d’autres, le préfet de police n’avait vu venir » la colère des étudiants et des salariés. Né en Ardèche d’un père très engagé dans la politique locale, Maurice Grimaud aborde les années 1930 comme étudiant de classe préparatoire littéraire. Il suit les cours de philosophie de Vladimir Jankélévitch au lycée du Parc, à Lyon, puis gagne le lycée Henri IV, à Paris, où Alain a cessé d’enseigner depuis le 1er juillet 1933 [6]. Il échoue au seuil de la rue d’Ulm. La carte de son Paris des années 1930 se partage entre une Cité universitaire que son aîné Robert Brasillach jugeait trop éloignée du Quartier latin [7], la Sorbonne où Georges Lefebvre commente à chaud les soubresauts du Front populaire, les théâtres où sont données les pièces de Giraudoux, les cinémas où on projette les films de Jean Epstein et le pavé où il faut défendre ce professeur Jèze qui soutient l’Éthiopie du négus contre l’Italie fasciste, et que les étudiants ligueurs – auxquels se mêle le jeune François Mitterrand – empêchent d’enseigner. Maurice Grimaud appartient à cette génération de khâgneux et de normaliens que sa culture politique situe en majorité à gauche et dans le camp pacifiste. Comme l’historien Pierre Guiral, qui en dirige la section marseillaise, il milite au Parti frontiste de Gaston Bergery en 1935-1936. Cette formation, que caractérise encore un antifascisme vigoureux, se prononce pour la paix à tout prix » [8]. Les lettres du jeune Maurice Grimaud ne dissimulent rien de ses aveuglements au moment de l’occupation de la Rhénanie par les troupes du Reich. On en saura gré à l’auteur, qui n’a pas cédé aux joies de la réécriture pour se découvrir une lucidité ou un courage rétrospectifs. Il regrette en effet de n’avoir pas su saisir les occasions d’héroïsme que [lui] offrirent les circonstances » [9]. Le jeune homme qui, en vacances dans le Béarn chez Maurice Martin du Gard, entendait siffler les balles et tonner les canons ne s’engagea pas pour autant auprès des Républicains espagnols. Le collaborateur du Résident général au Maroc ne gagna pas Londres à l’été 1940, pas plus que, passé à Alger, il ne rejoignit d’unité combattante après 1943. Maurice Grimaud sacrifie en revanche aux lois du genre lorsqu’il entreprend de retracer sa carrière administrative, dans la première partie de l’ouvrage. Son engagement au service de l’État est dépeint comme une entrée en religion, l’exercice des responsabilités comme une forme de sacerdoce. C’est sous le signe du hasard que l’auteur place son essai de », en faisant la part des amitiés et des convictions dans cet itinéraire. François Bloch-Lainé a posé les règles du genre des mémoires de serviteurs de l’État » ne jamais donner le sentiment qu’on a réussi par la brigue ou intrigué pour obtenir une responsabilité, se dépeindre en garant de la continuité de l’État par-delà le temps court de la politique [10]. Michel Winock apporte le sceau de l’historien à ce récit ordonné en écrivant dans la préface que la République s’est perpétuée grâce aux qualités de ses grands commis plus encore qu’aux actions éclatantes de ses ministres » [11]. L’équilibre du livre tient à ce que Maurice Grimaud y donne l’image d’un homme engagé sans être inféodé. Plus que comme le fidèle d’un parti ou d’un patron, il s’affirma comme un homme d’équipe pendant ses plus de cinquante de carrière professionnelle, de 1938 à 1992. L’auteur situe en effet son action dans le cadre de ces groupes de travail que soudent l’estime mutuelle et l’expérience commune des situations d’exception. En poste au Maroc à partir de 1938, il se constitua un premier capital professionnel auprès de jeunes fonctionnaires qui ont fait le choix du dépaysement. Il considéra Munich – dont il ne dit mot –, l’entrée en guerre, la défaite de juin 1940 et les débuts de la France libre depuis le Maroc, où il avait le sentiment d’être utile à son pays. D’autres que lui firent ce choix de gagner l’Afrique du Nord ou d’y demeurer avant l’opération Torch » on songe notamment à Michel Debré. S’il réprouva l’arrestation des passagers du Massilia réfugiés au Maroc, au nombre desquels figuraient Pierre Mendès France, Jean Zay et Georges Mandel, Maurice Grimaud semble comprendre l’attitude du résident général Noguès, qui refusa de poursuivre le combat après la demande d’armistice. Il rappelle que les autorités françaises du Maroc appliquèrent les décisions du régime de Vichy jusqu’en 1942, mais qu’aux marges des pratiques officielles pouvaient se développer des comportements dissonants démarches en faveur de Juifs allemands ou autrichiens pour que des consulats étrangers leur accordent des visas, contournement des décrets anti-maçonniques, … De 1942 à 1954, Maurice Grimaud devait connaître une carrière atypique pour un futur préfet de police, puisque ses expériences professionnelles successives le conduisirent principalement hors de métropole. Ayant rejoint une Alger passée à la France Libre, il gagna la métropole après la Libération de Paris, pour la quitter rapidement. Au cabinet de l’Administrateur général de la Zone française d’Occupation en Allemagne ou comme Conseiller de l’Organisation internationale pour les réfugiés à Genève, il entendit ensuite reconstruire ce que la guerre avait défait. De retour à Rabat comme directeur des services d’information de la Résidence générale de France au début des années 1950, l’ancien militant de gauche comprit que le Maroc de Papa » avait vécu et se heurta au lobby des gros colons proches du parti radical. Le mitan des années 1950 marqua plus tard une forme de retour dans le rang administratif pour Maurice Grimaud. Il partagea la sympathie de très nombreux hauts fonctionnaires pour l’expérience gouvernementale de Pierre Mendès France et y participa brièvement comme membre du cabinet de François Mitterrand, alors ministre de l’Intérieur. Ce passage par un cabinet ministériel devait l’autoriser à réintégrer en douceur » un corps préfectoral alors en voie d’institutionnalisation [12]. Préfet des Landes, il fut déplacé sur demande d’un parlementaire influent à la fin de la IVe République il n’est pas certain que le régime des partis » ait eu l’apanage de ces pratiques. Le cœur de sa carrière se situa aux grandes heures d’une République gaullienne. Entre 1958 et 1974, le régime exigeait de ses serviteurs une loyauté sans faille mais s’accommodait d’être exécuté par des grand commis libéraux ou progressistes. Comme directeur général de la Sûreté nationale, puis comme préfet de police de Paris, Maurice Grimaud eut à questionner sans cesse son rapport d’obéissance à l’autorité politique. A quel moment une opinion ou une analyse personnelles se transforment-elles en une forme de désobéissance à l’autorité ? Le devoir de réserve, qui n’a guère d’existence que jurisprudentielle, impose-t-il au fonctionnaire de taire ses scrupules face à une décision qu’il juge mauvaise en conscience ? La figure de Maurice Grimaud, homme d’autorité ennemi de toute répression aveugle, ne prend sens que par opposition à son prédécesseur. Le préfet de Mai 1968 est à première vue l’anti-Maurice Papon. La carrière en zigzags de l’un contraste avec l’itinéraire rectiligne de l’autre deux conceptions de la responsabilité administrative s’y trouvent peut-être incarnées. Pour Maurice Grimaud, un haut fonctionnaire a notamment le devoir d’informer l’autorité politique avec précision, sans dissimuler à son ministre sa préférence pour certaines options derrière l’intérêt des services ». L’ancien khâgneux féru de lettres et de philosophie était toujours présent chez le Préfet de police de mai 1968, qui plaida contre une réaction trop brutale auprès du Premier ministre Georges Pompidou ou du ministre de l’Intérieur Christian Fouchet. Son apparent libéralisme » en ces circonstances lui fut reproché a posteriori par Jean Rochet, directeur de la Direction de la surveillance du territoire DST à la fin des années 1960 [13]. Maurice Grimaud devait du reste se prononcer en faveur d’un meilleur contrôle de l’usage de la police par le pouvoir exécutif, quelques années seulement après avoir quitté ses fonctions [14]. L’identité de Maurice Papon vaut en revanche comme une eau-forte de ces grands commis guidés par l’amour de l’ordre et des formes administratives leur conception du service de l’État s’accommodait aisément de décisions brutales, voire criminelles dans le cas de Maurice Papon, pour peu qu’elles ne bouleversent pas la vie des bureaux. Le préfet Grimaud ordonna aux gardiens de la paix de ne pas faire preuve d’excès dans l’emploi de la force » le 29 mai 1968 ; son prédécesseur ne voulut pas retenir le bras des policiers au début des années 1960. Il permit au contraire qu’une certaine conception de la répression, développée sous la IVe République au nom de la lutte anticommuniste, se durcisse encore à la faveur de la guerre d’Algérie jusqu’aux massacres d’État des 17 octobre 1961 [15] et du 8 février 1962, à la station Charonne [16]. Je ne suis pas né en mai 68 ne manque pas d’allusions défavorables à l’ancien secrétaire général de la Gironde sous Vichy. Il est difficile d’adhérer pour autant au portait que Maurice Grimaud trace de lui-même en homme peu séduit par les questions de basse police ». Il entre une part – inévitable ? – de reconstruction dès lors qu’un fonctionnaire d’autorité publie des carnets ou des récits après les avoir relus et sans doute corrigés [17]. L’ancien directeur de la Sûreté n’entre pas dans les détails de la lutte d’influence menée entre 1962 et 1966 contre des services de renseignements fâcheusement pénétrés par l’OAS » [18], notamment le SDECE [19]. Il manie l’ellipse ou la litote pour éviter les détails de la lutte qu’il eut à conduire contre certains mouvements gauchistes après mai 1968, sur instructions du très répressif Raymond Marcellin, alors ministre de l’Intérieur [20]. Ces silences sont d’autant plus regrettables que la recherche s’intéresse désormais aux services d’information et aux questions que posent leurs modes de fonctionnement en régime démocratique [21]. Ces Mémoires méritent pourtant d’être versés aux sources d’une histoire politique de l’administration. S’y dessine une chronologie du spoil system à la française l’élection de Valéry Giscard d’Estaing aurait ainsi marqué une étape dans la politisation des élites administratives. Maurice Grimaud, qui reprit du service à soixante-huit ans au cabinet de Gaston Defferre, en mai 1981, insiste en revanche sur le caractère de continuité républicaine » que revêtit l’alternance du point de vue des grands commis. Voilà qui semblera rafraîchissant à l’heure où le statut des fonctionnaires évolue vers une contractualisation non avouée…
AuCentre Pompidou, l'exposition consacrée à Christo et Jeanne-Claude, reportée en raison de l'épidémie de coronavirus, aura finalement lieu du 1er juillet au 19 octobre 2020. Une exposition
Documentaire histoire de 1h25min de 2012Le récit des quatre années et demi du couple Pompidou à l'Elysée, depuis la calomnie initiale jusqu'à la mort du Président, terrassé par une Claude et Georges Pompidou l'amour au coeur du pouvoirSynopsisDébut octobre 1968, une rumeur enflamme le tout-Paris Claude Pompidou, la femme de l'ancien Premier ministre, aurait fait assassiner un playboy yougoslave, Stephan Markovic, parce qu'il la faisait chanter avec des photos de parties fines. Ce complot sordide scelle le destin de Georges Pompidou, qui vient de quitter Matignon après six années de fonction. Outré par cette machination fomentée par certains gaullistes, il décide de briguer la présidence. Ce documentaire raconte les quatre années et demi du couple Pompidou à l'Elysée, depuis la calomnie initiale jusqu'à la mort du président, terrassé par une leucémie.
Débutoctobre 1968, une rumeur enflamme le tout-Paris : Claude Pompidou, la femme de l'ancien Premier ministre, aurait fait assassiner un playboy yougoslave, Stephan Markovic, parce qu'il la faisait chanter avec des photos de parties fines. Ce complot sordide scelle le destin de Georges Pompidou, qui vient de quitter Matignon après six années de fonction.
1En 2013, lors d’une table ronde au Centre Georges-Pompidou de Paris organisée dans le cadre des commémorations du centenaire de la naissance de Claude Simon, Maylis de Kerangal confessa ses réticences de jeune fille face à l’œuvre d’un écrivain qu’elle percevait comme celle d’un classique », car elle était enseignée comme telle à l’université. Or, il n’en fut pas toujours ainsi. Loin s’en faut ! Deux événements possèdent une importance extrême dans la prise en compte par les universitaires d’un écrivain qui fut longtemps considéré comme un second couteau » du Nouveau Roman l’attribution du prix Nobel de littérature en 1985 et l’inscription au programme de l’agrégation de lettres de La Route des Flandres en 1998. 2Pressentant peut-être cette reconnaissance du monde des lettres, j’avais inscrit au mois d’octobre 1985 ce roman au programme du cours de littérature contemporaine que je dispensais alors en troisième année de licence à l’université Marien Ngouabi de Brazzaville République Populaire du Congo. Ce roman remplaçait La Modification de Michel Butor qui les années précédentes avait constitué le texte de référence pour l’étude du Nouveau Roman. Or, une fois maîtrisée la langue du texte », l’intérêt des étudiants s’est révélé très vif à l’endroit d’un ouvrage qui traitait de la guerre, de la défaite, de l’emprisonnement, au travers d’une écriture à la fois brute et rigoureusement travaillée. La modification du trajet impulsé à son existence par Léon Delmont lors de son périple ferroviaire n’avait préalablement que peu sollicité leur attention. L’errance des cavaliers dans les paysages dévastés par la guerre possédait selon eux une dimension universelle qui excédait toute référence historique et géographique précise. Et, les lecteurs qu’ils étaient par ailleurs des livres d’Henri Lopes et de Tchicaya U Tam’si retrouvaient dans le texte de Simon la même écriture fragmentée, éruptive et ironique. Cette réaction démontrait qu’au-delà de son inscription dans la mouvance du Nouveau Roman, l’œuvre possédait une identité littéraire susceptible de toucher un large public. 3Une autre expérience dans le contexte universitaire africain mérite d’être ici rapportée. À l’université de Bujumbura Burundi, afin de réfléchir sur l’histoire immédiate du pays à travers divers textes de la littérature française, j’avais construit en 1991 un cours consacré à la représentation de la guerre civile qui comprenait Les Tragiques d’Agrippa d’Aubigné, L’Espoir d’André Malraux, Le Palace de Claude Simon et La Parenthèse de sang de Sony Labou Tansi. En août 1988, dans les communes de Ntega et Marangara situées au nord du pays, avait été perpétré un terrible massacre qui s’était soldé par la mort de 150 000 Hutus. Il s’agissait donc de comprendre l’incompréhensible en étudiant les stratégies discursives auxquelles recourent les œuvres littéraires afin d’exprimer l’ineffable. Le texte de Simon présentait la difficulté de représenter la guerre civile à l’intérieur de la guerre civile, en l’occurrence les exactions commises par les communistes à l’encontre des trotskistes et des anarchistes. Néanmoins, la part dévolue par le roman à l’implicite, au non-dit et surtout au refus de conférer quelque sens que ce soit à l’Histoire constituait selon les étudiants le langage par excellence de la violence irraisonnée qui se déchaîne à l’occasion de ces guerres intestines. 4En 1999, à l’université de Provence, dans le programme d’un cours consacré au roman de guerre, j’avais inscrit L’Acacia, qui, au terme d’un parcours distinguant les textes traitant du premier et du second conflit mondial, les associait sous la forme d’un long récit de guerre dont les circonstances historiques n’occultaient pas le caractère monstrueux que possédait par et en lui-même le phénomène. L’investissement autobiographique propre au roman intéressa tout particulièrement les étudiants qui, contrairement aux autres œuvres du corpus, les plaçait en présence non d’un combattant, mais d’un homme dont la guerre constitua l’une des épreuves cruciales que lui infligea la vie. Parallèlement à ce cours destiné aux étudiants de première année de licence, un autre enseignement proposé aux étudiants de deuxième année de licence traitait des représentations romanesques de la jalousie. Parmi les œuvres du programme figurait La Bataille de Pharsale. Le motif de la jalousie n’étant pas ostensible comme il l’est par exemple dans Un amour de Swann ou La Prisonnière, les étudiants furent profondément déconcertés par la singularité du texte. La mise en place de la grammaire scripturale à laquelle procèdent les trois parties du roman leur parut absconse, les enjeux du motif de la jalousie à l’intérieur du tissu textuel leur apparurent incompréhensibles et son écriture illisible. Ils témoignèrent de leur seul attrait pour la matière guerrière de la fiction. Que la bataille de Pharsale puisse être une métaphore de la jalousie les laissa profondément sceptiques. 5De 1999 à 2017, sous diverses formes, j’ai consacré un cours au roman contemporain, qui chaque fois accordait une importance majeure à la mouvance du Nouveau Roman. J’ai dans ce cadre étudié en compagnie des étudiants tour à tour les principaux romans de Claude Simon, en m’efforçant de démontrer que si, indéniablement, l’œuvre du romancier s’inscrivait dans le cadre spécifique de ce mouvement esthétique, elle possédait tout aussi indubitablement son identité propre, ce qui autorisait à l’appréhender en dehors de toute référence collective. Dans le contexte d’un cours, puis d’un séminaire consacré au phénomène contemporain de la réécriture et de l’intertextualité, nous avons étudié la spécificité de l’héritage proustien inscrite au cœur de l’œuvre ainsi que les innombrables insertions hypertextuelles d’œuvres littéraires et picturales qui émaillent les textes. C’est ainsi que progressivement Claude Simon s’est imposé comme l’un des maillons majeurs au sein du processus qui durant le dernier quart du xxe siècle a conduit le roman du modernisme vers le postmodernisme. Les études successives de L’Herbe, d’Histoire, de Triptyque, des Géorgiques et du Tramway ont convaincu les étudiants de l’efficience que possède dans son œuvre le protocole scriptural qu’il a mis en place roman après roman pour représenter conjointement le moi et le monde, l’histoire dans l’Histoire, l’acte créateur à l’intérieur même de la création. 6Lors de l’année universitaire 2017-2018, deux romans de Claude Simon figuraient dans des programmes qui ne privilégiaient pas l’un des axes spécifiques de son œuvre. Ainsi, Le Vent était analysé selon une approche typologique, la spécificité de l’individu face au corps social et Le Tramway relativement à une perspective générique, celle du récit d’enfance. Les stratégies scripturales du romancier ne représentaient plus l’enjeu de l’étude, mais, confrontées à celles radicalement différentes d’autres écrivains contemporains, elles révélaient leur irréductible singularité, fondatrice d’un univers littéraire à nul autre semblable. Aussi, par un effet en soi paradoxal, c’est en banalisant » l’œuvre que je parvins à en faire reconnaître l’infinie richesse par ces étudiants de première année de licence. 7Il n’en demeure pas moins que chaque fois la supposée difficulté de l’œuvre simonienne resurgit dans l’esprit des étudiants au moment où ils se consacrent à leurs travaux de recherche. Parfois, l’un me propose de rédiger un mémoire de master sur tel ou tel aspect de cette œuvre, mais le projet ne dépasse pas le stade de la velléité. Cette année encore, un étudiant en master s’est proposé d’étudier les représentations de l’érotisme à l’intérieur de l’œuvre, en précisant qu’il avait l’intention de mener sa réflexion sur le sujet jusqu’à la thèse de doctorat. Il reste à souhaiter que l’ampleur de la tâche ne le conduise pas au découragement, que le classicisme » de l’écrivain n’estompe pas l’enthousiasme initial en réduisant son travail de recherche à un fastidieux exercice académique. En attendant, pour la seconde année consécutive, L’Acacia se trouve au programme de littérature comparée à l’agrégation de lettres. Nouvelle opportunité de traiter de l’une des œuvres maîtresses de l’écrivain face à un public qui peut-être le connaît mal. Mais aussi nécessité de reconnaître que décidément le texte simonien est devenu l’apanage de l’institution universitaire. Ainsi, ce qui apparaissait en 1985 puis en 1998 comme l’expression d’une reconnaissance salutaire peut en 2018 sonner le glas du plaisir du texte, seule garantie valide de la survie d’une œuvre. Et, cette année, les romans de Claude Simon ne sont présents dans aucun de mes programmes de cours. Manière bien évidemment d’en parler ailleurs et autrement.
mercredi27 février 2013 à 09:15 | Tony Cotte Capture France 2 Après s’être intéressé au couple Pompidou ( Claude et Georges Pompidou, l’amour au cœur du pouvoir ), Pierre Hurel a choisi de
Par Laurent P., Elodie D. Photos par Elodie D. Publié le 15 novembre 2019 à 18h36 Le Centre Pompidou accueille Christian Boltanski du 13 novembre 2019 au 16 mars 2020 pour une grande exposition, "Faire son temps". Une exposition à la symbolique puissante, qui questionne la vie, la mort et ce long chemin qu'est la vie ! L'art n'a aucune frontière... Le Centre Pompidou consacre une exposition au plasticien français Christian Boltanski du 13 novembre 2019 au 16 mars 2020. L'artiste ne veut pas parler de rétrospective mais d'une œuvre à part, un cheminement dans ses œuvres avec une trame particulière la vie, ou plutôt la mort. À lire aussiLes expositions d'août 2022 à Paris et en Ile-de-France à ne manquer sous aucun prétexteQue faire ce week-end à Paris avec les enfants, ces 20 et 21 août 2022Les musées et monuments gratuits ce dimanche 4 septembre 2022 à Paris"Faire son temps" réunit 40 œuvres "sensible et corrosive", l'exposition questionne ce qui reste de nous après la mort. Une photo, une vidéo, des vêtements, et nos restes, enfermés dans un cercueil ou une boîte... Et à côté de cela, l'environnement, immuable, avec ces champs de blé et ses vagues qui viennent et reviennent à l'infini. Si Christian Boltanski semble macabre, il parle toujours avec humour et considère que l'art est une façon d'explorer la question de la mémoire nécessaire. Impossible de ne pas penser à la Shoah dans cette exposition, une obsession pour Boltanski. L'artiste est né en 1944 de parents juifs, et pose souvent la question de la survie. On est vite mal à l'aise et il est difficile de trouver une œuvre qui fasse sourire dans ce dédale. On se perd vite entre le Terril Grand-Hornu 2015, amas de vêtements noirs, les Fantômes de Varsovie 2001 et les Tombeaux 1996, et on pense qu'ils nous hanteront pendant des années... Preuve que Christian Boltanski a réussi son pari de la mémoire !
Claudeet Georges Pompidou sur la jetée du fort de Brégançon, probablement en août 1969 (photo : Getty Images?) Partager sur . lieux associés Brégançon. Mot-clés Portrait de Claude Pompidou Portrait de Georges Pompidou. Autres ressources en lien. Texte. Visite du président italien, Giovanni Leone, le 1er octobre 1973 (3 textes) Giovanni Leone, président de la
Après s’être intéressé au couple Pompidou Claude et Georges Pompidou, l’amour au cœur du pouvoir, Pierre Hurel a choisi de pénétrer au cœur du Clan Chirac pour les besoin du documentaire du même nom. Un portrait de famille dont le documentariste souhaitait tirer une vérité romanesque ». Au fil des images d’archives et des nombreux témoignages, la carrière du président se dessinait. Une dimension humaine éclairée par la présence des trois femmes – Bernadette, Claude et Laurence – qui entourent Jacques Chirac. Le résultat a alors rassemblé millions de téléspectateurs, pour du public présent entre 20h50 et 22h35. Le clan Chirac a permis à France 2 d’occuper la deuxième marche du podium, devançant de peu la rediffusion du Petit Nicolas sur M6. Il s’agit de la meilleure performance pour un documentaire unitaire en Prime cette conforte l’engagement et la mission de France 2, chaîne de l’événement, de la différence et de la création au service de tous », conclut le communiqué de France Télévisions.
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